21 mai 2021
Dans le cadre de la Grande Transition, des syndicalistes ont organisé deux sessions sur les défis des luttes actuelles. On le sait, les syndicats sont présentement en état de siège. Dans le secteur public, les programmes austéritaires ont érodé la force syndicale en la fragmentant entre catégories professionnelles, d’où l’inexistence d’un véritable Front commun regroupant les 500 000 employé-es de l’État. Dans le secteur public, les entreprises dépendent beaucoup d’énergie pour bloquer la syndicalisation, en commençant par les géants du numérique et du commerce. Malgré tout au Québec, le taux de syndicalisation demeure élevé, surtout si on le compare à celui qui prévaut aux États-Unis. Les syndicats ont une tradition de lutte politique et il y a depuis 2012 une nouvelle génération militante. Le renouvellement à la fois sur les moyens d’actions et sur les revendications amènent les syndicats vers les enjeux environnementaux. Des syndicats innovateurs comme celui des Travailleurs et Travailleuses des postes sont en mesure de proposr des moyens concrets où le sauvetage des emplois menacé par la privatisation en douce se combine à une approche éco responsable. Dans plusieurs syndicats se constituent des comités d’action environnementaux. Les centrales syndicales comme la CSN, la CSQ et la FTQ se joignent à des coalitions comme le Front commun pour la transition énergétique. C’ets un travail ardu, parsemé d’embûches, surtout quand des emplois dépendent des activités prédatrices des grands opérateurs miniers et pétroliers.
C’est cette discussion qu’ont abordé Dominique Daigneault, présidente du Conseil Centrl du Montréal Métropolitain de la CSN et Patrick Rondeau, responsable des campagnes environnementales à la FTQ. Avec d’autres syndicalistes, ils ont lancé récemment le Réseau intersyndical pour le climat, qui a pour objectif d’unir nos efforts vers une transition énergétique juste pour les Québécoises et les Québécois. Ce réseau a produit une déclaration dont voici des extraits.
Sans surprise, les mêmes phénomènes causent les changements climatiques et augmentent les risques de pandémie. Des scientifiques mandatés par l’ONU en pleine pandémie mondiale nous avertissent d’ailleurs que des crises sanitaires encore plus graves sont à prévoir si la dégradation de la nature se poursuit. Alors que la crise de la COVID-19 devrait avoir une durée limitée, les dérèglements climatiques, eux, vont se poursuivre longtemps encore et risquent de s’aggraver : il n’y aura pas de vaccin contre la crise climatique… Le remède est connu, il faudra toutefois l’appliquer avec autant d’énergie et de diligence que la lutte contre la pandémie pour atténuer les effets de la catastrophe annoncée.
Pour contrer la menace des changements climatiques à l’échelle mondiale, des transitions vers des économies sobres en carbone doivent s’opérer. Au Québec, nous avons la chance d’être dans une position particulièrement choyée pour réussir rapidement une telle transition énergétique.
Au-delà du secteur de l’énergie, la crise climatique entraînera des transformations majeures dans l’ensemble de l’économie et dans le monde du travail. Faisons alors en sorte que la transition soit juste pour les travailleuses et les travailleurs de même que pour la santé des écosystèmes.
Partout, nos organisations syndicales veilleront à ce que les transformations dans les milieux de travail n’entraînent pas de précarisation, mais bien une amélioration des conditions de vie des travailleurs et travailleuses, ainsi que de leurs communautés. Nous visons une transition juste.
Dans les secteurs où il y a aujourd’hui la plus haute intensité d’émissions de gaz à effet de serre, il faut permettre aux travailleuses et aux travailleurs de participer avec d’autres acteurs de leur communauté à l’identification et à la mise en place de solutions locales concrètes ; la transition deviendra alors préventive et non seulement réactive. Nos modèles de travail seront à repenser pour ouvrir des perspectives de diversification économique pour nos régions. Il faudra évidemment prévoir des programmes de formation pour la requalification des travailleurs et des travailleuses qui verront leur emploi se transformer. Les travailleuses et travailleurs ne doivent pas être laissés à eux-mêmes en raison de nos choix collectifs de transition. Il en va de notre responsabilité commune.
Pour rendre l’économie du Québec viable au regard du défi climatique, il faudra de plus favoriser les emplois d’utilité sociale et environnementale, dont les emplois du secteur public. Non seulement ils ont en général une empreinte carbone faible, mais ils ont aussi pour effet de renforcer l’accessibilité et la qualité des services publics permettant ainsi de rendre le Québec plus résilient face aux crises, tout en favorisant une transition juste. Nous refusons en ce sens toute politique d’austérité et de privatisation des services publics. Pour soutenir une transition énergétique juste, nous revendiquons une politique fiscale plus progressiste qui redistribue mieux les richesses et qui finance adéquatement les services publics en privilégiant des initiatives porteuses pour relever le défi climatique.
Finalement, qu’importe le secteur d’emploi, les travailleuses et travailleurs devront être informés des transformations nécessaires à la transition et prendre part activement aux décisions quant à ces changements. Du petit comité dans le milieu de travail jusqu’à celui à l’échelle québécoise et au-delà, les syndicats auront un rôle clé à jouer dans la transition.
C’est pourquoi nous avons décidé de former une alliance pour unir nos efforts en ce sens : le Réseau intersyndical pour le climat. Forts de cette alliance, nous allons partager nos expériences et déployer des initiatives conjointes pour favoriser une transition écologique juste pour le Québec. Nous souhaitons vivement que l’après-crise sanitaire soit l’occasion de refonder notre économie sur des bases plus justes et plus viables. La portée du plan de relance devrait être fondée sur cet objectif.
La planète mérite mieux. Les travailleurs et travailleuses du Québec méritent mieux. Le Québec mérite mieux.
Signataires
Andrée Poirier, présidente de l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS)
Luc Vachon, président de la Centrale des syndicats démocratiques (CSD)
Sonia Ethier, présidente de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ)
Jacques Létourneau, président de la Confédération des syndicats nationaux (CSN)
Dominique Daigneault, présidente du Conseil central du Montréal métropolitain – CSN (CCMM-CSN)
Marc-Édouard Joubert, président du Conseil régional FTQ Montréal métropolitain (CRFTQMM)
Sylvain Mallette, président de la Fédération autonome de l’enseignement (FAE)
Daniel Boyer, président de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)
Nancy Bédard, présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ)
Christian Daigle, président général du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ)
Line Lamarre, présidente du Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ)