Cette image déjà bien sombre a été encore noircie par des évènements que l’on croyait appartenir au passé : les émeutiers de la faim se sont manifestés sur tous les continents contre la dramatique flambée des prix des produits alimentaires. Au cours du premier trimestre 2008, les prix nominaux des principales denrées alimentaires ont atteint leur plus haut niveau en près de 50 ans, tandis que les prix réels atteignaient leur niveau record en près de 30 ans marquant un décalage net par rapport aux revenus des ménages dans les pays en voie développement.
Il s’agit d’une contraction des stocks alimentaires et des hausses de prix massives, en particulier pour les denrées de base. Les prix du blé, du riz et du soja ont bondi de plus de 40 % (60 % dans le cas du riz) depuis le début de 2007 (voir le graphique ci-après). Les agriculteurs du monde entier ont eu une production record de 2,3 milliards de tonnes de céréales en 2007, soit 7 % de plus que l’année précédente. Depuis 1961, la production mondiale de céréales a triplé, alors que la population a doublé. Les stocks sont à leur niveau le plus bas depuis 30 ans, c’est vrai, mais en définitive la production alimentaire mondiale est suffisante pour nourrir la population.
Le problème est que ces produits agricoles ne parviennent pas à tous ceux qui en ont besoin. Moins de la moitié de la production céréalière mondiale est directement consommée par les populations. La plupart sert à l’alimentation animale et, de plus en plus, aux biocarburants, à travers des filières industrielles gigantesques et rigides. Les produits alimentaires sont ainsi passés du statut de biens assurant l’alimentation et la sécurité des moyens d’existence des populations, à celui de produits destinés à la spéculation et au marchandage au bénéfice des investisseurs.
Lire la suite : L’impact de la crise alimentaire aggravée par la crise financière sur les populations des pays du Sud [PDF – 28 pages]