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Un bilan décevant de l’aide canadienne en Haïti

Un an après le séisme survenu le12 janvier 2010 en Haïti, les membres de la Concertation pour Haïti (CPH) dont est membre Alternatives dressent un bilan décevant de l’aide canadienne en Haïti.

L’approche préconisée par le gouvernement canadien ne permet pas d’amorcer véritablement une reconstruction d’Haïti. Privilégiant une stratégie de court terme et des projets à effets de redressement rapide, les projets financés par le Canada ne s’attaquent pas aux causes structurelles de la vulnérabilité d’Haïti. Or, c’est à cette seule condition qu’Haïti pourra se reconstruire autrement et durablement.

Malgré les multiples déclarations du Canada annonçant un engagement de 400 millions de dollars pour la reconstruction d’Haïti pour 2010-2011, moins d’un tiers du budget prévu dans le cadre de l’engagement de New York pour l’année 2010 a été déboursé.

De plus, la CPH constate un manque de transparence et une absence de reddition de compte de la part du gouvernement canadien en ce qui concerne les projets de reconstruction et sa contrepartie au Fonds d’aide aux victimes du séisme du 12 janvier. Le gouvernement s’était engagé le 14 janvier 2010 à égaler les dons des citoyens canadiens qui se sont finalement élevés à 220 millions de dollars. Toutefois, ce n’est qu’au mois de novembre qu’il a confirmé que sa contrepartie sera puisée à même les fonds qu’il a préalablement déboursés pour l’aide humanitaire d’urgence et à même l’engagement de New York.

L’absence d’un cadre stratégique et la lenteur des décaissements contredisent la prétention du gouvernement canadien d’être un donateur de premier plan en Haïti, sa première priorité dans les Amériques et sa deuxième priorité dans le monde.

Par ailleurs, le gouvernement du Canada a abandonné son rôle de leader dans la défense des droits humains au profit d’une approche sécuritaire. Tous les indicateurs abondent dans ce sens : multiplication démesurée des projets liés à la stabilisation et la sécurisation d’Haïti dont le budget avoisine 75 millions de dollars, augmentation du budget du Groupe pour la stabilisation et la reconstruction (GTSR), prolongement de sa contribution à la MINUSTAH et accroissement des effectifs policiers et d’agents correctionnels.

Alors qu’à titre d’exemple, le Canada n’a octroyé depuis le séisme que 2,5 millions de dollars pour permettre l’accès à la justice aux citoyens les plus démunis.

Cette approche sécuritaire contribue à la perte de crédibilité du Canada au sein de la Communauté internationale, comme le confirme sa récente défaite à l’obtention d’un siège temporaire au Conseil de sécurité des Nations unies. L’Agence canadienne du développement international (ACDI) se limite, quant à elle, à trois priorités thématiques :

1. accroître la sécurité alimentaire, 2. assurer l’avenir des jeunes et des enfants, 3. favoriser une croissance économique durable. L’ACDI écarte du coup tout projet visant à protéger les droits humains et à renforcer la démocratie haïtienne, deux secteurs qui étaient pourtant prioritaires dans l’engagement du Canada en Haïti depuis des décennies. De plus, l’ACDI a délaissé son rôle d’appui à la société civile haïtienne.

La CPH dénonce les stratégies d’aide du Canada en Haïti et recommande que le gouvernement :
- Rende compte des montants et du contenu des projets de reconstruction qu’il finance ;
- Réoriente son aide et élabore un cadre stratégique tenant compte de stratégies alternatives de développement ;
- Revienne à une approche axée sur les droits humains et à l’instauration d’un état de droit ;
- Appuie la création de nouveaux espaces de concertation et de coordination avec l’État haïtien et la société civile haïtienne, tout en facilitant l’appui direct aux acteurs locaux.

Au lendemain de la Conférence de New York des donateurs en mars 2010, le ministre Cannon déclarait : « nous avons donné généreusement et maintenant, nous nous attendons à des résultats ». Avant de réclamer des résultats, la CPH exige que le gouvernement du Canada commence par tenir ses promesses.

Pour l’analyse et les recommandations détaillées de la CPH, veuillez vous référer au document de plaidoyer politique.

À propos de la Concertation pour Haïti Fondée en 1994, la CPH est un regroupement d’organisations non gouvernementales, d’organisations de la société civile et de membres individuels du Québec qui participent au mouvement de solidarité avec le peuple haïtien. Les organisations membres de la CPH sont Alternatives, Amnistie internationale, Association Québécoise des organismes de coopération internationale (AQOCI) (membre observateur), Centre international de solidarité ouvrière (CISO), Coalition pour la protection de l’environnement et le développement durable en Haïti (COPEDH), Comité de Solidarité/Trois-Rivières (CSTR), Développement et Paix, Droits et Démocratie (membre observateur), Equitas, Handicap International, L’Entraide missionnaire, OXFAM-QUÉBEC, Regroupement des organismes canado-haïtiens pour le développement (ROCADH), SUCO, YMCA du Québec.

Les membres individuels sont : Lody Auguste, Pierre Bonin, Madeleine Desnoyers, Catherine Duhamel, Francine Néméh, Marlène Rateau.

Pour information additionnelle : Catherine Duhamel (514) 827-6903, Suzanne Loiselle (514) 270-6089, Denis Labelle (418) 391-2310

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