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Un vent de changement à la CSN ?

On a beau affirmer d’une manière péremptoire que le gouvernement libéral a perdu toute crédibilité comme l’a dit la présidente de la CSN, il faut quand même constater que le capitalisme est en mesure d’utiliser un arsenal de moyens idéologiques, politiques et organisationnels pour chercher à museler le mouvement syndical.

Dimanche le 15 mai dernier, le coup d’envoi était donné pour le 63e congrès de la CSN. Le thème du congrès situe les enjeux sur la nécessité d’un renouvellement sur le plan syndical. On parle de se renouveler, de se réinventer, de réinvestir, de revaloriser, de reverdir etc. Non seulement, on invite les délégué-es à réfléchir sur les enjeux de renouvellement syndical mais à la tête de l’exécutif, des changements importants vont s’opérer dans les prochains jours. Rappelons que trois membres de l’exécutif ont annoncé leurs départs : Roger Valois et Lise Poulin ainsi que la présidente Claudette Carbonneau.

À l’ouverture du congrès, Claudette Carbonneau a fait un discours bien senti. Un discours axé sur l’avenir du syndicalisme devant des défis immenses qu’il devra affronter : réussir des luttes en faveur de la syndicalisation, garder la tête haute dans un contexte de crise financière, renouveler le modèle de développement durable, réduire les inégalités sociales et lutter contre la montée de la droite au Québec et au Canada.

Cette question cruciale et actuelle de la montée de la droite a été au cœur des discours du président du Conseil central du Montréal Métropolitain, Gaétan Chateauneuf ainsi que ceux des présidents de la FTQ et de la CSQ, Michel Arsenault et Réjean Parent qui ont tous deux salué Claudette Carbonneau comme ayant été une grande dame du syndicalisme, en réponse directe à la bêtise prononcée par Jean Charest, il y a plusieurs années.

Un passé récent difficile !

En écoutant l’ensemble de ces discours, on ne peut que faire le constat suivant : la nécessité de renouveler le syndicalisme est déterminé par un bilan peu reluisant en matière de lutte pour la défense des droits des travailleurs syndiqué-es. Force est de constater que des attaques idéologiques s’intensifient contre la raison même du syndicalisme comme on l’a entendu par les déclarations du chef de l’ADQ. Dans la même foulée, on constate que sur le terrain des luttes, on assiste tout autant à une intensification des attaques contre le syndicalisme comme le démontrent les conflits au Journal de Montréal ou encore aujourd’hui au Centre de santé et des services sociaux Jeanne Mance à Montréal.

On a beau affirmer d’une manière péremptoire que le gouvernement libéral a perdu toute crédibilité comme l’a dit la présidente de la CSN, il faut quand même constater que le capitalisme est en mesure d’utiliser un arsenal de moyens idéologiques, politiques et organisationnels pour chercher à museler le mouvement syndical. En somme, la seule victoire concrète qui est évoquée à la fois par la présidente de la CSN et les autres présidents des centrales est l’entente du front commun dans le secteur public. Et cette victoire n’est pas validée sur le critère de l’amélioration des conditions de travail mais plutôt sur la possibilité du mouvement syndical d’avoir regagné le droit à la négociation après 5 ans de décret. Si on tient compte de l’ensemble des difficultés vécues par le mouvement syndical depuis quelques années, cette victoire est bien mince.

Des pistes de travail multiples

Devant la diversité des attaques contre le syndicalisme, le défi est immense de trouver les orientations et les pratiques qui pourront consolider le syndicalisme d’une manière adéquate et le mener vers de véritables victoires. Lorsqu’on regarde les propositions du congrès de la CSN, plusieurs pistes sont intéressantes. On pense ici aux pistes sur le renouvellement du syndicalisme et au renouvellement du concept du développement durable. On peut cependant déplorer une absence d’unité dans le discours.

On voit défiler une sorte de « patchwork » de propositions sur les inégalités sociales, la formation et l’éducation, la francisation, vieillir dans la dignité, le surendettement des personnes, les régimes de retraite, l’organisation du travail et le secteur manufacturier sans comprendre tout à fait les liens sur le plan politique et économique qui les tiennent ensemble. Cependant, ce manque d’unité est tout à fait normal dans la mesure où ce sont les pratiques syndicales elles-mêmes et les luttes qu’elles sauront mener qui apporteront cette unité dans le discours d’une organisation syndicale comme la CSN.

La relève

Comme nous l’avons signalé, une proportion importante de l’exécutif de la CSN quitte le bateau cette semaine. Louis Roy devrait normalement se faire élire par acclamation en tant que président. De nouveaux dirigeants vont sauter sur la scène. L’ancien secrétaire général du conseil central du Montréal Métropolitain, Jacques Létourneau devrait occuper la première vice présidence et Jean Lortie, président de la Fédération du commerce devrait occuper le poste de secrétaire général. Par ailleurs, une élection aura lieu pour le poste laissé vacant par le départ de Roger Valois. Cette élection opposera les deux présidents des conseils centraux de la région de Montréal et celle de l’Estrie, Gaétan Chateauneuf et Jean Lacharité.

D’une manière générale, les militants et les militantes de la CSN vont sûrement se demander si cette relève saura répondre aux impératifs de changement qui sont annoncés selon le thème même du congrès. Sans commencer à faire une analyse concrète de chacune des candidatures, il est vraisemblable de croire que cette relève pourrait répondre à une partie des changements annoncés. Cette relève possède certains attributs qui pourraient annoncer un avenir positif.

D’une manière générale, on peut penser qu’une certaine sympathie pourrait se dégager à l’égard du développement d’une alternative politique de gauche au Québec. Et, par ailleurs, on pourrait voir poindre un soutien aux luttes syndicales qui vont se produire. Car cette relève à la direction a aussi contribué à soutenir des luttes qui ont été importantes pour la CSN et la classe ouvrière québécoise. Pensons ici en particulier aux grèves de l’hôtellerie qui sont des luttes exemplaires qui passent trop souvent à l’oubli.

Mais par-dessus tout, un nouveau leadership syndical doit s’appuyer sur la capacité des syndicats à mener des luttes locales et régionales. Dans la même foulée, ce leadership syndical doit aussi appuyer ces luttes qui vont apparaitre dans un avenir approché sans l’ombre d’un doute. Le capitalisme, nous l’avons dit, ne cesse de développer son arsenal sur tous les fronts pour s’attaquer aux organisations syndicales. Il va de soi, dans ce cas, que les ripostes vont se faire entendre. La nouvelle direction de la CSN devra entendre ces luttes et les supporter. Sinon, elle risque de s’enliser dans une logique de reproduction de l’appareil syndical. Ce qu’il faut éviter par tous les moyens possibles !

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