L’année 2017 marque le 50e anniversaire de l’assassinat de Che Guevara, commandé par le CIA. À la lumière d’un regain récent des dénonciations du Che et de la révolution cubaine, il importe de départager les faits des fictions. Voici 5 points saillants dont il faut tenir compte.
• Il y a un cercle croissant de gens qui tapent systématiquement sur Cuba, et qui recherchent effectivement le renversement de la révolution cubaine, y compris chez certains qui se proclament de gauche. Dans leur exigence de la perfection, ils ont tendance à ne voir que les échecs de la révolution cubaine et de ses dirigeants. Ils déforment la vérité et fondent leurs arguments sur des mensonges tel que la qualification du Che comme « stalinien zélé », attaché aux « pratiques autoritaires », ou les Comités de défense de la révolution (CDR) comme organismes « d’espionnage et de « contrôle du peuple ». En réalité, les CDR étaient et demeurent des institutions clés de la démocratie socialiste et participative, en évolution et loin de la perfection, que les jeunes révolutionnaires (Fidel avait 33 ans; Che, 31) cherchaient à établir en 1959, face à l’agression étatsunienne persistante soutenue par les partisans irréductibles de l’ancienne dictature de Batista. 58 ans plus tard, cette agression passe par le blocus économique, la mainmise sur Guantánamo, des actions terroristes, des menaces militaires, une offensive culturelle orchestrée et les subventions aux « dissidents » (mercenaires), aux agents de la CIA et à certaines ONG à Cuba, sans compter les mensonges répétés des mass-médias de la désinformation, y compris celle de certains médias sociaux (2).
• Che a compris la centralité d’une politique fondée sur l’éthique avec une prévalence des facteurs subjectifs, d’où découle la transformation de la société cubaine en école géante pour reconquérir la culture et les valeurs éthiques du pays. D’où les campagnes d’alphabétisation et de « travail volontaire », les progrès de l’enseignement, de la médecine, de la participation populaire, des réformes agraires, de la construction d’habitations, qui ont transformé les objectifs idéalistes fondés sur la pensée de Martí, Mella, Guiteras et d’autres révolutionnaires de l’histoire cubaine, et en réalité évolutifs sur le terrain qui semblait impossibles, même dans les rêves les plus fous!
• En refusant le recours aux méthodes capitalistes pour combattre le capitalisme, Che et Fidel ont mis en œuvre les méthodes dialectiques du marxisme-léninisme pour réaliser l’option maximale possible : réaliser une révolution socialiste de libération nationale, transformatrice des institutions et des rapports sociaux et humains, par une praxis organisée et consciente qui – malgré les erreurs qu’ils et leurs héritiers ont reconnus – perdure aujourd’hui.
• Comme on savait à l’époque et confirmé dans ses écrits (3) postérieurs à son assassinat commandé par la CIA en 1967, le Che a émis plusieurs avertissements quant aux périls venant des carences du « socialisme existant » et de la reprise mécanique des manuels et méthodes soviétiques. Il a observé qu’au « dogmatisme intransigeant de l’ère stalinienne a succédé un pragmatisme inconsistant … un retour au capitalisme ». Il a perçu les actions et propositions de la révolution cubaine comme « contraires à ce qu’on lit dans les manuels [soviétiques] » et a contribué aux critiques marxistes perspicaces des sociétés capitalistes et socialistes, et de leurs théories.
• Che, comme Fidel, était profondément engagé en faveur de la paix, mais malheureusement, il a dû prendre les armes pour que le monde se rapproche de cet objectif éphémère. Pour la possibilité d’un monde sans guerre, Che a donné sa vie, comme Fidel y a consacré la sienne. On a beaucoup à apprendre de leurs exemples.
(1) Historien, activiste, poète, auteur de plus de 50 ouvrages, membre de la Table de concertation Québec-Cuba.
(2) Arnold August, Cuba–U.S. Relations: Obama and Beyond (Canada: Fernwood Publishing, 2017).
(3) Che Guevara, Critical Notes on Political Economy (2007) et Philosophical Notebooks: Writings on Marxism and Revolutionary Humanism (Ocean Books, 2008).
Traductrice: Marie Stewart