mardi 25 mai 2010, par Yves Bergeron
L’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS) a récemment publié un rapport intitulé « Qui s’enrichit, qui s’appauvrit » portant sur l’évolution de l’écart des richesse au Québec entre 1976 et 2006 parmi les familles québecoises avec enfants. Les résultats de ce rapport vient mettre d’importants bémols au discours néolibéral sur la répartition des richesses en régime capitaliste néolibéral.
Voir en ligne : Le site de l’IRIS
Nous avons souvent l’occasion d’entendre les chantres de l’économie capitaliste nous dire qu’avant de répartir la richesse, il faut la créer. Bien, l’étude de l’IRIS nous apprend qu’entre 1976 et 2006, l’économie a connu une croissance totale de 71%. Toutefois, dans le contexte d’offensive patronale et de l’état-patron, la large part de cette croissance a été appropriée par la frange des 10% les plus riches de la société québecoise alors que les 70% les plus pauvres ont vu leur part se réduire. De ce fait, l’écart entre les riches et les pauvres atteint aujourd’hui un sommet au cours des trente dernières années.
Travailler plus pour gagner moins
Autre idée reçu des haut-parleurs de la droite, il faut travailler davantage pour demeurer compétitif, améliorer son sort et combler l’écart avec les plus riches. Or, rien n’est plus faux. Les familles québecoises travaillent en moyenne annuellement 321 heures de plus qu’en 1996 soit l’équivalent de 8 semainies de travail à temps plein. Pourtant, ces familles ont connu une baisse de leur revenu réel de l’ordre de 1 à 20% au cours de cette période. Par ailleurs, les familles dont le revenu se situe dans les 10% le plus élevé ont vu leur revenu croître de 24% au cours de la même période. L’étude de l’IRIS conclut que les familles du milieu et du bas de l’échelle ont travaillé plus fort simplement pour se maintenir à flot. À l’opposé, les familles qui se situent dans les 10% les plus riches n’ont pas eu à travailler davantage tout en voyant leur revenu augmenter de 24% au cours de la même période.
Les effets de la crise de 1990
La crise du début des années 1990 a contribué à la réduction du revenu de la grande majorité des familles québecoises. Cependant, les familles dont le revenu se situe parmi les 10% les plus riches n’ont pris que 3-4 années a retrouver leur niveau d’avant crise alors que les plus faibles revenus ont pris plus de 8 années à retrouver leur niveau d’avant 1990 ce qui a contribué à creuser le fossé davantage.
Par ailleurs, cette fameuse classe moyenne dont les porte-parole de la droite se proclame les défenseurs devrait se chercher de meilleurs amis. En effet, les politiques économiques de la droite ont contribué à appauvrir les familles se situant au niveau intermédiaire des revenus. Selon l’étude de l’IRIS, les familles qui se situe au milieu de l’échelle des revenus représentaient 42% des familles québecoises à la fin des années 1970 ne comptent plus que pour 20% lors de la récession des années 1990. On peut présumer que ce recul s’est poursuivit avec la crise récente.
La complicité des gouvernements néolibéraux successifs
Les politiques de baisse d’impôt pour les plus riches associées aux coupures dans les politique dites de filet social a aussi contribué à creuser l’écart entre les plus riches et la majorité des familles québécoises. L’étude souligne toutefois que les familles québécoises ont mieux résisté à ce phénomène que dans le reste du Canada justement grâce à ces politiques de sécurité sociale. Toutefois, les coupures et gels salariaux ont contribué, dans le contexte de politique de déficit zéro à maintenir les moyens et bas salariés à leur niveau de la fin des années 1980 alors que les familles les plus riches ont quant à elles connu des hausses de revenus importants.
L’étude de l’IRIS confirme ce que d’autres ont affirmé dans le passé
Statistiques Canada publie régulièrement des études sur les revenus et le patrimoine des familles canadiennes. Parmi celles-ci, celle de 2006 révélait que 20% des familles les plus riches au Canada détiennent 75% du patrimoine (avoirs, actions d’entreprises, obligations, placements, etc.) du pays (Le Devoir du 14 décembre 2006). La même étude confirmait que cet écart se creuse depuis le début des années 1980 : les familles du quintile supérieur détenaient 75 % de la richesse totale des ménages en 2005, contre 73 % en 1999 et 69 % en 1984.
Reprendre la bataille pour la répartition de la richesse
Les Marois, Charest et Deltell logent touTEs à la même enseigne et veulent appliquer la recette qui a conduit à la situation actuelle sous le regard approbateur de Lucien Bouchard et sa bande de renégats (comme s’ils ignoraient ces chiffres et cette réalité). Et ce phénomèene n’est pas circonscrit à l’Amérique du Nord. Des économmistes comme Michel Husson (voir À nouveau sur la part salariale, revue Regard, été 2009) ont souligné ce phénomène à l’échelle de l’Europe.
C’est la bataille de la droite politique et ses complices qui a réussit à faire accepter aux classes populaires de payer pour les politique de déficit zéro comme aujourd’hui on veut faire payer les faillites du système bancaire international. Les chantres du libre marché font tous les efforts possibles pour culpabiliser la population alors qu’ils sont les seuls responsables du gachis actuel.
Seules les luttes syndicales et populaires pour reprendre le terrain perdu en revendiquant des augmentations de salaires peuvent payer. À ce titre, la bataille du front commun des syndicats du secteur public représente un enjeu important tout comme celle de la Coalition contre la tarification et la privatisation des services publics. Des victoires sans appel de ces luttes permettraient de changer le rapport de force qui jusqu’ici a bénéficié à la droite.