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Québec Solidaire à la croisée des chemins

Ginette Lewis, militante de QS dans la région de Québec, 27 avril 2021

 

Quelle évaluation faites-vous depuis le début de la pandémie de l’action-intervention de QS?

Avec la pandémie, le cours électoraliste de QS a pris le devant de la scène. Tout l’aspect médiatique, quand il y en a eu car le médias ont donné le devant de la scène à monsieur Legault, s’est axé sur : être un bon parti en temps de pandémie, suivre la santé publique et ainsi se situer à la même hauteur que les autres oppositions. Rien n’a été développé pour penser et affirmer ce qu’un parti de gauche devrait avancer en temps de pandémie sur le matériel insuffisant, sur les travailleuses et travailleurs en santé et en éducation qui mettent leur vie en danger jour après jour, sur la nécessaire solidarité internationale pour les vaccins et l’accès aux médicaments. QS aurait pu mettre sur pied une campagne politique de soutien et de solidarité contre la COVID sur tous ces éléments. Une affiche ou des autocollants de masse avec de bons slogans percutants auraient permis une visibilité au discours de gauche. QS devrait davantage questionner François Legault sur ses politiques contre la Covid, mais aussi sur d’autres thématiques pour montrer son caractère de gouvernement de droite.

Dans le moment actuel, il semble que la CAQ consolide son emprise sur la scène politique?

La CAQ a réussi une couverture médiatique sans précédent durant la Covid. C’est seulement durant la troisième vague que les tergiversations, les improvisations et surtout les mensonges éhontés sont apparus plus clairement. Justement au moment où les oppositions ont commencé à questionner davantage le gouvernement. Il est clair qu’avec les taux de satisfaction que recensent les sondeurs, la CAQ s’achemine vers un gouvernement majoritaire aux prochaines élections. Pourtant comme gouvernement pro-patronal. on a rarement vu mieux; garantie des coupes forestières et appui au projet GNL sous couverture d’un plan vert, valorisation des anges gardiens (au masculin en plus alors que 75% du personnel dans le secteur public sont des femmes), mais en même temps, stagnation dans les négociations du secteur public en fonction d’un et cadre financier ne dépassant pas le 2% d’augmentation désigné par l’OMC, subventions à tour de bras aux grosses compagnies. On pourrait aussi ajouter le matériel défectueux dans les services de garde, insuffisant dans le secteur hospitalier et la ventilation « acceptable » dans les écoles. Il ne manquerait plus que des subventions pour un stade de baseball, pas encore annoncées officiellement mais probables,  pendant que de nombreuses institutions dans la santé et l’éducation exigent plus de financement. Pour finir, pendant qu’on refuse de reconnaître le racisme systémique, des Joyce Echequan meurent, des femmes racisées sans papier continuent de trimer à bas salaire dans les agences de placement pour soigner nos personnes aînées.

Partant de la formule acceptée au début qui définissait QS comme le parti des urnes et le parti de la rue, est-ce qu’il y a convergence entre la rue et les urnes est encore à l’ordre du jour ?

J’ai toujours espoir que QS continue de se définir et d’agir comme un parti des urnes et de la rue. La campagne « Ultimatum 20-20 » a été organisée autour d’un mot d’ordre du national qui pensait organiser par miracle les militants et militantes à la base. Cela s’est avéré un rêve inefficace. Par contraste, la dernière campagne sur « Non à GNL », lancée et efficacement organisée par la direction en coopération avec les régions et les associations, a réussi son objectif de mobiliser les personnes militantes à la base et à apparaître nationalement contre un projet des plus destructeurs de l’environnement. Il est donc possible de voir naître des initiatives intéressantes de mobilisations des membres.

Des efforts ont été consacrés cette dernière année pour susciter la participation des membres aux débats, en mode virtuel. Est-ce que ces mesures ont eu des effets? Est-ce que le membership pourrait être davantage activé?

Le virtuel, ce n’est pas le présentiel. Mais du point de vue des régions, d’une certaine conciliation travail et famille, le virtuel a des avantages incontestables y compris de participation démocratique, même si cela exige un équipement informatique et un accès à l’internet qui n’est pas disponible partout au Québec. Les développements technologiques ont permis une meilleures diffusion des débats et une participation accrue. Il faut continuer à favoriser cette participation. Dans la région de la capitale nationale, le comité des femmes a vu sa participation croître chez les jeunes femmes via les outils comme ZOOM, ce qui facilitait la conciliation travail/famille.

Sur la question de la lutte anti raciste et contre les discriminations, est ce que QS en fait assez?

QS doit continuer le travail entrepris contre la loi 21, et continuer à rappeler que les essentiel-le-s sont beaucoup des personnes racisées, surexploitées et parfois sans papier.  La dimension identitaire risque d’être un enjeu de la prochaine campagne électorale. Il faudra que QS soit très clairement positionné pour la lutte à l’indépendance du Québec, mais contre tout approche nationaliste identitaire. Pas question de parler de Québécois (et où sont les Québécoises) de souche, de culture strictement québécoise.

Sur l’enjeu de la solidarité internationale, qu’est-ce que QS pourrait faire de plus ?

C’est dans la compréhension de la dimension internationale de toutes nos problématiques que doit se situer nos points de vue. L’indépendance du Québec doit s’élargir et parler de l’alliance avec les forces progressistes au Canada anglais et aux États-Unis. Elle doit se nourrir des expériences en Écosse et en Catalogne. Les luttes des femmes à travers le monde ont clairement démontré que le patriarcat n’agit pas seulement au Québec. Pour lutter contre il faut développer notre solidarité internationale et mettre en pratique le slogan « Tant que toutes les femmes ne seront pas libres, nous marcherons ». Les travailleuses et travailleurs dans la santé en France, en Europe ont aussi connu les même déboire ce celles et ceux du Québec. Des liens doivent se créer, mais les centrales syndicales préfèrent développer une stratégie strictement québécoise de la lutte pour des services publics gratuits, accessibles partout et offrant un travail décent, protégé et bien rémunéré. Il faut aussi répercuter les luttes menées à travers le monde contre les dictatures, contre les monopoles comme Amazon, contre les compagnies extractivistes canadiennes, contre les pratiques prédatrices, contre les féminicides, contre les discriminations. Et créer de l’espoir en révélant des expériences d’auto-organisation locales, d’agriculture écologique, de cuisines collectives, d’entraide communautaire, de distribution de la richesse et de partage.

 

 

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