Dans le contexte d’un néo-libéralisme triomphant sur la planète, de son digne représentant canadien maintenant majoritaire et déterminé à imposer son joug sur les classes populaires et d’un gouvernement provincial corrompu et prêt à toutes les magouilles pour vendre le Québec et l’appareil d’État au plus offrant, la mobilisation populaire est plus que jamais déterminante pour faire contrepoids à pareils rouleaux compresseurs.
Cependant, ce contrepoids est tributaire du rapport de force réel que nous pouvons opposer aux dirigeants de la droite. Comme le démontrent les luttes persistantes du Surois, du Mont-Orford et du Gaz de schiste, ce ne sont que les luttes qui mobilisent un nombre important d’électeurs qui les font reculer un tant soit peu. Ainsi, la question qu’il faut se poser c’est : au-delà de mobiliser les réseaux et organismes militants, quelles sont les luttes et les groupes qui mobilisent vraiment les personnes pour lesquelles ils se battent ?
À cet effet, une analyse sommaire des différents mouvements populaires nous font voir que les luttes victorieuses résultent de réseaux et de groupes ayant une base citoyenne importante et mobilisée.
À cet égard, les mouvements des femmes, des étudiants et des écologistes, chacun à leurs façons et selon leurs spécificités, mobilisent une base citoyenne qui se reconnaît dans ces mouvements, se maintient ou se renouvelle. Ce sont ces mouvements qui, ces dernières années ont réussi à créer des rapports de force importants et à faire reculer le gouvernement sur certaines de leurs revendications.
Par contre, les mouvements syndicaux et communautaires, réunissant pourtant beaucoup plus d’organismes, peinent à faire valoir leurs revendications et à gagner leurs luttes. Serait-ce que, dans le cas du mouvement syndical, il fait peu appel à sa base, depuis plusieurs années, au profit de négociations sans réel rapport de force et subit ainsi défaites sur défaites ? Et, dans le cas du mouvement communautaire, serait qu’il manque cruellement de base citoyenne ayant muté au cours des ans d’organismes de soutien à l’organisation citoyenne en organisme de services sans chercher à ce que ses usagers développent un quelconque sentiment d’appartenance ?
Ces questions méritent réflexion et, le cas échéant, corrections qui s’imposent.
Ainsi, prenons exemple sur les syndicats qui développent une vie syndicale forte basée sur la conscience de la communauté d’intérêt de leurs membres, de la force de leur nombre et de leur capacité à améliorer leurs conditions et celle de leur milieu. Et comparons-les avec les syndicats qui, pour plusieurs de leurs membres, sont devenues une sorte de police d’assurance personnelle à qui l’ont verse des paiements en retour de services. Quelles sont leurs structures de participation, leurs sujets de programme d’éducation, leurs principales activités courantes ? On y trouvera sûrement matière à expliquer les gains des premiers et les défaites des seconds.
Du côté du mouvement communautaire, la situation est plus dramatique. Hormis certains secteurs qui se sont développés sur une base revendicatrice comme le mouvement sur le logement et les réseaux familles, quels sont les organismes qui peuvent se targuer d’avoir une base citoyenne forte ? Même les organismes militants de défense des droits sociaux peinent à mobiliser leurs membres. Serait-ce que les permanents qui les animent ont peu à peu troqué le soutien à l’organisation citoyenne au profit de services d’information développant peu un sentiment d’appartenance chez eux ? Ou serait-ce que les raisons objectives de se regrouper autour de ces services ne sont pas évidentes ? Quels sont les besoins pour lesquels les citoyens sont prêts à s’organiser entre eux ? Les luttes des mouvements citoyens spontanés de ces dernières années ont-ils, à cet effet, des leçons à nous apprendre ? Autant de questions que nous débattrons dans cette table ronde.