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Le repli identitaire du Parti Québécois

Deux postures de repli, l’une religieuse et l’autre linguistique, sont alimentées par le repli identitaire qui s’est installé au Parti Québécois (PQ) depuis la crise des accommodements raisonnable de 2007-2008. Ce courant oppose majorité à minorités et défend qu’un « authentique Québécois » se doit d’adhérer au nationalisme traditionnel, celui du Canadien français catholique, condamnant à l’exclusion ceux qui formulent une vision critique de ce passé et tous ceux dont la mémoire historique est autre (les autochtones, les Québécois anglophones et tous les immigrants, y compris ceux provenant de France).

La page Idées du Devoir publie le 22 septembre dernier, deux textes, celui de Jean Dorion et celui de Pierre Nepveu, qui convergent en pointant involontairement ce qui mine l’orientation du PQ.

Jean Dorion montre que le PQ se fragilise, en appuyant unanimement le maintien du crucifix à l’Assemblée nationale tout en parachutant Mme Djemila Benhabib dans la circonscription de Trois-Rivières. Il obtient ainsi l’appui d’André Drouin, auteur du Code de vie d’Hérouxville, tout en se coupant des milliers de musulmans du Québec. Comment ignorer que les Québécois musulmans ne vont guère plus à la mosquée le vendredi que les catholiques à l’église le dimanche ? Comment peut-on les qualifier de sectaires ? Mme Benhabib transpose au Québec la lutte qu’elle a menée en Algérie, en ne reconnaissant pas que, s’il y a des musulmans fondamentalistes et intégristes ici, ils n’y sont proportionnellement pas plus nombreux que les chrétiens et les juifs qui défendent des positions extrémistes.

Pierre Nepveu montre que le repli sur une défense frileuse du français, en ciblant comme ennemi la langue anglaise et en ne valorisant pas la diversité du français parlé à Montréal, est une attitude qui ne peut que laminer et glacer le combat légitime des Québécois francophones. Comment ignorer que Montréal, comme toutes les grandes villes des pays industrialisés (Toronto, Paris, Londres, etc.), est devenue de fait multiculturelle ? Pourquoi seulement insister sur la donne que le français n’est plus majoritairement parlé dans les familles montréalaises ? Ne devrions-nous pas au contraire nous réjouir que de plus en plus de Montréalais puissent, qu’elle que soit leur langue maternelle, s’exprimer en français sur la place publique ?

Ces deux postures de repli, l’une religieuse et l’autre linguistique, sont alimentées par le repli identitaire qui s’est installé au PQ depuis la crise des accommodements raisonnable de 2007-2008. Ce courant oppose majorité à minorités et défend qu’un « authentique Québécois » se doit d’adhérer au nationalisme traditionnel, celui du Canadien français catholique, condamnant à l’exclusion ceux qui formulent une vision critique de ce passé et tous ceux dont la mémoire historique est autre (les autochtones, les Québécois anglophones et tous les immigrants, y compris ceux provenant de France).

Menés par le sociologue Jacques Beauchemin devenu sous-ministre du gouvernement Marois pour le dossier linguistique, les penseurs du repli identitaire ont désagrégé le néonationalisme social et politique des années 1960-1970 et disqualifié le modèle d’intégration pluraliste incarné politiquement par Gérald Godin et défendu intellectuellement par Gérard Bouchard, Micheline Labelle, Michel Seymour et d’autres. On ne peut défendre une identité en niant celle des autres. La question identitaire ne doit pas servir à l’instauration d’inégalités entre catégories de citoyens. Il nous semble évident que ce repli nationaliste conservateur ne peut qu’affaiblir le Québec, en effritant ses appuis à l’étranger et en s’aliénant les énergies de toutes les minorités qui pourraient participer à la construction d’une nation québécoise inclusive.

Jean-Pierre Couture et Jean-Marc Piotte,

auteurs de Les Nouveaux Visages du nationalisme conservateur qui vient de paraître chez Québec Amérique.

La page Idées du Devoir publie le 22 septembre 2012, deux textes, celui de Jean Dorion et celui de Pierre Nepveu, qui convergent en pointant involontairement ce qui mine l’orientation du PQ.

Jean Dorion montre que le PQ se fragilise, en appuyant unanimement le maintien du crucifix à l’Assemblée nationale tout en parachutant Mme Djemila Benhabib dans la circonscription de Trois-Rivières. Il obtient ainsi l’appui d’André Drouin, auteur du Code de vie d’Hérouxville, tout en se coupant des milliers de musulmans du Québec. Comment ignorer que les Québécois musulmans ne vont guère plus à la mosquée le vendredi que les catholiques à l’église le dimanche? Comment peut-on les qualifier de sectaires? Mme Benhabib transpose au Québec la lutte qu’elle a menée en Algérie, en ne reconnaissant pas que, s’il y a des musulmans fondamentalistes et intégristes ici, ils n’y sont proportionnellement pas plus nombreux que les chrétiens et les juifs qui défendent des positions extrémistes.

Pierre Nepveu montre que le repli sur une défense frileuse du français, en ciblant comme ennemi la langue anglaise et en ne valorisant pas la diversité du français parlé à Montréal, est une attitude qui ne peut que laminer et glacer le combat légitime des Québécois francophones.

Comment ignorer que Montréal, comme toutes les grandes villes des pays industrialisés (Toronto, Paris, Londres, etc.), est devenue de fait multiculturelle ? Pourquoi seulement insister sur la donne que le français n’est plus majoritairement parlé dans les familles montréalaises? Ne devrions-nous pas au contraire nous réjouir que de plus en plus de Montréalais puissent, qu’elle que soit leur langue maternelle, s’exprimer en français sur la place publique ?

Ces deux postures de repli, l’une religieuse et l’autre linguistique, sont alimentées par le repli identitaire qui s’est installé au PQ depuis la crise des accommodements raisonnable de 2007-2008. Ce courant oppose majorité à minorités et défend qu’un « authentique Québécois » se doit d’adhérer au nationalisme traditionnel, celui du Canadien français catholique, condamnant à l’exclusion ceux qui formulent une vision critique de ce passé et tous ceux dont la mémoire historique est autre (les autochtones, les Québécois anglophones et tous les immigrants, y compris ceux provenant de France).

Menés par le sociologue Jacques Beauchemin devenu sous-ministre du gouvernement Marois pour le dossier linguistique, les penseurs du repli identitaire ont désagrégé le néonationalisme social et politique des années 1960-1970 et disqualifié le modèle d’intégration pluraliste incarné politiquement par Gérald Godin et soutenu intellectuellement par Gérard Bouchard, Micheline Labelle, Michel Seymour et d’autres.

On ne peut défendre une identité en niant celle des autres. La question identitaire ne doit pas servir à l’instauration d’inégalités entre catégories de citoyens. Il nous semble évident que ce repli nationaliste conservateur ne peut qu’affaiblir le Québec, en effritant ses appuis à l’étranger et en s’aliénant les énergies de toutes les minorités qui pourraient participer à la construction d’une nation québécoise inclusive.

Jean Pierre Couture et Jean-Marc Piotte sont les auteurs de LesNouveaux Visages du nationalisme conservateur qui vient de paraître chez Québec Amérique.


Éditions Québec-Amérique
ISBN : 978-2-7644-2167-3
162 pages – 24,95 $
Aussi disponible au format :
EPUB et PDF

Les nouveaux visages du nationalisme conservateur au Québec

Sommaire

Les auteurs Jean-Marc Piotte et Jean-Pierre Couture s’intéressent dans cet essai au nationalisme conservateur qui se distingue radicalement du néonationalisme progressiste qui a marqué et dominé le mouvement souverainiste québécois depuis 1960.

À cette fin, les auteurs proposent un chapitre pour chacun des principaux auteurs contemporains de cette mouvance, soit Éric Bédard, Jacques Beauchemin, Marc Chevrier, Stéphane Kelly, Gilles Labelle et Joseph Yvon Thériault. Au fil de l’ouvrage, ils relèvent les dénominateurs communs qui permettent de les identifier au nationalisme conservateur. Parmi ceux-ci, les auteurs notent le passéisme, la critique conservatrice de la modernité, une épistémologie idéaliste, l’oubli ou le rejet de l’apport des sciences sociales, et l’euphémisation de leur conservatisme.

Extrait

Notre contribution avait pour objectif d’éclairer de façon critique la réorientation intellectuelle du mouvement souverainiste depuis 2007-2008. Notre ouvrage est né d’une inquiétude face à la renaissance d’un nationalisme conservateur qui, au nom d’un passé mythifié et d’une nation surplombante et divinisée, souhaite liquider l’héritage des multiples luttes pour la liberté, l’égalité et la solidarité qui ont traversé le Québec. Contre le repli sur soi des néoconservateurs, il nous semble qu’il faille réinscrire, en bout de piste, le Québec dans les débats sur la crise économique, environnementale, politique et culturelle qui secoue le monde dont nous faisons inévitablement partie.

 

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