La bataille pour l’«égaliberté»

« En réalité, le néolibéralisme, plus qu’un plan d’austérité, est une vision du monde, en l’occurrence, celle des dominants. »

Jean-Paul Faniel

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Tout le monde a une assez bonne idée de ce qu’est le néolibéralisme : attaques répétées contre les gains sociaux, privatisation du secteur public, financiarisation à outrance de l’économie, marchandisation accélérée des besoins essentiels. Qui sont visés ? Travailleurs et travailleuses, chômeurs-euses, jeunes, aînés, femmes, immigrants : pratiquement tout le monde ! C’est tellement évident et tellement scandaleux ! Alors vient la question qui tue : comment les dominants arrivent à faire passer cela ?! En réalité, le néolibéralisme, plus qu’un plan d’austérité, est une vision du monde, en l’occurrence, celle des dominants. Mais cette vision pénètre largement la conscience des dominés, via les médias-poubelles et de puissants appareils idéologiques d’état.

 

 

 

Tout-le-monde-contre-tout-le-monde

 

Le message est le suivant : il n’y a pas de société, encore moins de peuple. Il n’y a que des individus ! Et chacun est une entreprise qui s’inscrit dans la bataille de la concurrence où les plus forts gagnent. En fin de compte, le principe normatif, c’est « tout-le-monde-contre-tout-le-monde », dans une vision méchamment darwinienne : les gagnants ont raison puisqu’ils survivent, les perdants ont tort puisqu’ils ne survivent pas ! Entre-temps, les dominants inculquent la peur de l’autre (surtout s’ils ne sont pas nés ici), ou encore l’indifférence et le mépris contre les couches populaires («  tous des  Bougons »). Au bout du compte, l’État doit laisser le « marché » (lire « les capitalistes ») réguler l’économie et se concentrer à défendre, par tous les moyens nécessaires, les individus et la propriété, les deux socles de la « démocratie libérale ». Ainsi, en éducation, on judiciarise le « droit individuel » à se scolariser. En santé et dans les services sociaux, on privatise les services. On songe à marchandiser des besoins aussi essentiel que l’eau et on laisse les capitalistes spéculer sur l’alimentation comme si manger était un luxe. En milieu de travail, après avoir dévalisé la caisse d’assurance-emploi, on spolie les chômeurs et chômeuses. On isole les jeunes travailleurs des plus vieux avec les clauses « orphelin » pour faire passer le pillage des retraites. Diviser, humilier, culpabiliser, susciter des conflits à n’en plus finir sont autant de moyens pour écraser le peuple, à chaque jour, voir à chaque seconde.

 

 

 

Résister

 

Mais voilà que resurgit une vielle-nouvelle idée : la solidarité, la coopération, l’idée de se mettre ensemble et de s’appuyer, ce qu’Étienne Balibar appelle l’« égaliberté ». Cette résistance repose sur l’idée que la liberté et l’égalité n’existent pas l’une sans l’autre. Citoyens et citoyennes sont co-responsables et co-garants pour eux/elles-mêmes, mais aussi pour les prochaines générations et pour la terre toute entière (Pachamama), qui est un ensemble solidaire et organique de vies humaines et non-humaines et de non-vies. Ce message, celui des Carrés rouges notamment, devient de plus en plus fort. De grandes confrontations se profilent dans ce qui devient une véritable guerre des idées. Notre rôle, c’est de contribuer à élaborer cette alternative idéologique à travers  les luttes et les chantiers où la force populaire se construit.

 

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