Une victoire parce qu’il faut dire que cette fois ils ont mis le paquet. Le Québec est «dans le rouge» scandait chaque matin le Journal de Montréal relayé en soirée par TVA. Même chanson du côté de l’axe propagandiste Gesca-Radio-Canada où on explique qu’enfin on ose s’en prendre aux vaches sacrées. Vache sacrée, c’est ainsi que maintenant au Québec il est de bon ton de parler de nos droits sociaux à la santé et à l’éducation. Pour faire le travail du côté de l’électorat nationaleux, on a même mobilisé la figure totémique qu’est devenu l’avocat patronal Lucien Bouchard.
S’ils ont enfin réussi à élargir la brèche, c’est d’abord parce que nous n’avons pas simplement à faire à des idéologues qui se contentent de remoudre à l’infini les vérités néolibérales. Ce sont des stratèges qui ont su tirer les leçons de leurs tentatives précédentes. De mémoire, rappelons le sort subis par le rapport Gobeil (1986) jugé trop socialement explosif et les tentatives avortées de réingénérie de l’État québécois lorsqu’en 2003 nous avons massivement expliqué à M. Charest que nous n’avions pas voté pour cela.
Nos patients stratèges ont redéployés leur discours à la faveur du choc de la crise en redoublant d’effort pour du même coup délégitimer les revendications même les plus modestes des salariés de l’État. À un point tel que certaines organisations syndicales, un moment désarçonnées, se sont mises à jongler avec l’idée que peut-être une hausse des tarifs d’électricité ou de la TVQ permettrait de dégager des marges de manoeuvres…
Cette approche a freiné le processus de constitution d’une force sociale syndicale et populaire unifiée autour d’une critique commune du discours et des projets gouvernementaux.
VERS UNE GRÈVE SOCIALE?
Mis à part le courageux combat du seul député de Québec Solidaire, aucune force politique parlementaire ne s’oppose sérieusement à cette proposition budgétaire profondément anti sociale. Le PQ, lesté de ce qui restait de son aile syndicaliste, n’a plus qu’a s’incliner devant les cris de joie de ses Facal tout en faisant mine se s’indigner. Il faut s’opposr à ce budget de toute nos forçes car refuser d’essayer de le stopper, c’est déjà accepter d’ouvrir une brèche béante dans laquelle s’engouffrera d’autres mesures beaucoup plus sévères. Il convient donc de renouer d’urgence avec la perspective d’une mobilisation de la société civile avec, au premier rang, les salarié-es de l’État, afin d’expliquer à nouveau que nous n’avons pas voté pour ca. Nous n’avons pas voté pour freiner l’accessibilité au système de santé et d’éducation supérieure. Nous n’avons pas voté pour laisser le crime organisé ponctionné les fonds publics en lien avec certaines élites politiques. Nous n’avons pas voté pour que s’installe une tricherie à grande échelle dans le financement des partis politiques. Nous n’avons pas voté pour que les amis de Tomassi fassent main-basse sur des pans entiers du réseau de garderie.
Nous proposons donc qu’on discute de la possibilité de remettre à l’ordre du jour la perspective d’une grève sociale afin d’obtenir rien d’autre que des élections générales. Ceux et celles qui disent et écrivent que ce budget est historique ont raison. Son rejet doit l’être aussi. Ils ont raison de crier victoire mais nous avons surtout raison de nous révolter !