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Face à la crise, que fait le mouvement syndical en France ?

La stratégie adoptée  par les organisations  syndicales françaises depuis  janvier 2009, en plein contexte  de crise économique et de confrontation  avec  le gouvernement Fillon, ne cesse d’alimenter  des  commentaires critiques, marqués par l’incompréhension ou le scepticisme. Alors  que  l’attentisme  des  syndicats  durant la deuxième  moitié  de  l’année  2008  pouvait être éclairé par la guerre de positions qu’ils se livraient en  vue  du  scrutin prud’homal  du  3 décembre  – consultation  électorale  qui, si elle n’a pas mobilisé les salariés, a par contre for te- ment occupé  les équipes  militantes, de Solidaires à la CFE-CGC  –, la prudence  que  traduit l’organisation  à plusieurs  semaines  d’inter valle de grandes journées nationales d’action alimente de for tes interrogations quant aux finalités poursuivies  et sur tout quant  aux raisons présidant  à de tels choix tactiques.

Le temps  a paru  effectivement fort long, en particulier dans  les secteurs  en lutte comme l’enseignement supérieur,  entre  l’imposante journée de grèves et de manifestations  du 29 janvier et celle du 19 mars 2009. Mais que dire, alors même  que les manifestations  de mars se sont révélées  plus massives  encore  que  celle de  janvier, que  des  salariés du  secteur  privé y ont été de nouveau  présents  en raison de la multiplication  des  plans  de  licenciements collectifs, de  l’incapacité  de  l’intersyndicale  à proposer  des suites à la mobilisation,  au lendemain  de  cette  seconde  journée  d’action ? Après  dix jours d’attente, le 1er mai  a finalement  été  annoncé  comme  ne  devant  pas être  « protocolaire  » mais  « revendicatif  » et l’annonce  de défilés communs  à toutes les organisations  comme  un événement historique, donc en lui-même  signifiant.

Une  explication  courante, au moins  dans  les discours produits  « à chaud  » dans les rangs militants, consiste  à  pointer  la distance  qui sépare  la «  base  », soit les salariés  et syndicalistes « de terrain » ayant massivement répondu  aux  appels  du  29  janvier  et du  19 mars, des  appareils  dirigeants  qui gouvernent le « sommet  » des  organisations.  La bureaucratisation de ces derniers les conduirait à privilégier d’autres intérêts que ceux qu’ils affichent  officiellement,  et ce au  mépris  d’un potentiel de lutte pour tant attesté par la force des  démonstrations  convoquées à six semaines de distance. Les directions, et en particulier celle de la confédération  à l’heure actuelle la plus puissante, soit la CGT, seraient-elles  en train de « trahir » alors même  qu’elles disposent  d’un  important  rapport de  forces ? La question  résonne d’autant plus fort qu’ailleurs, et en particulier en Guadeloupe, l’épreuve  de force prolongée  avec le gouvernement n’a pas été  écartée  et qu’elle  s’est incarnée  dans  un mouvement social d’ampleur  exceptionnelle.

La focalisation  sur une  opposition  entre base et sommet, la dénonciation  des trahisons bureaucratiques  peuvent  servir de  catharsis dans  le feu  de  l’action, afin de  ne  pas  céder au découragement. Mais force est de constater qu’elles  contribuent  bien  plus souvent  à conforter les convictions  des  militants  partisans d’un  syndicalisme  « de  lutte » qu’à  déstabiliser la ligne  de  dirigeants  réduits  à l’identité de cyniques  professionnels. Parfois, l’accusation de  cynisme  va  jusqu’à  la mise  en  cause  des « bureaucrates  corrompus  ». Si les pratiques d’influence  orchestrées  par des  représentants d’intérêt  patronaux  sont  bien  réelles, cette dimension  est cependant un cas d’espèce pour faire exploser la dichotomie  base/sommet. Des professionnels  du  syndicalisme  naturellement por tés au dialogue  social  parce  qu’ils collectionnent les jetons de présence  dans les organismes  sociaux, aux  responsables  de  syndicat ou de fédération  qui troquent  la « paix sociale » contre  des  facilités matérielles  pour  leur organisation, en passant par les syndicalistes en entreprise qui négocient  avantageusement leur propre  licenciement,  les façons  d’être « acheté » sont multiples, même  s’il convient  de les relativiser. Dans  ce contexte, les sommets confédéraux,  certes parce  qu’ils sont  le plus exposés  publiquement, mais  aussi parce  qu’ils sont au faîte de hiérarchies encore fondées sur une légitimité  proprement  militante, apparaissent  relativement  moins  inquiétés  par de telles dépendances. Ce  registre d’explication suppose en outre un décalage entre le discours et les actes, une  sorte de  conscience  coupable, alors même  que les dirigeants des centrales syndicales  sont  persuadés  de  proposer  la meilleure  orientation, sinon  la seule  possible. Ce sont  dès  lors d’autres  formes  d’adhésion, plus idéologiques,  qui doivent  être explorées pour  expliquer  cette  stratégie  d’empilement de journées d’action.

Un autre registre courant  d’explication  éclaire les stratégies  syndicales  par leur « fonction  » dans  le cadre  du  capitalisme  mondialisé.  Partout dans le monde, des organisations  syndicales « intégrées » depuis plusieurs décennies  au système ne pourraient faire autrement  que de négocier  des  contreparties sociales  à la logique de l’exploitation, contreparties de plus en plus maigres  du fait de  la radicalisation  néolibérale des classes dominantes. Cette approche néglige un point essentiel : le rôle du syndicalisme n’est jamais donné  une fois pour toutes, il dépend  des luttes qui se mènent  dans et hors de  cet univers. De  ce point  de  vue, la situation française  est particulièrement  intéressante. À la différence  de beaucoup d’autres pays, le syndicalisme  pouvait  en  effet  y apparaître moins  « intégré  », la configuration  syndicale étant  marquée  par  l’hégémonie de  la CGT, autrement  dit par  un  syndicalisme  interprofessionnel  depuis  ses origines, historiquement nourri par une  idéologie  de  lutte des  classes (dans  ses versions  successivement syndicaliste révolutionnaire  et communiste),  refusant de se penser comme  un « médiateur  » entre travail et capital. De  même,  l’émergence  des  syndicats Sud  à la fin des années  1980, comme  le maintien  d’une  certaine  conflictualité  sociale tout au long de cette période, sembleraient témoigner de l’existence de nombreuses ressources pour proposer une alternative radicale au  néolibéralisme.  Comment  dès  lors expliquer l’adoption d’une stratégie d’évitement relatif  de  la  confrontation,  légitimée  de  fait par toutes  les organisations  dans  le cadre  de l’intersyndicale  ? Pour  éclairer ce paradoxe,  il importe de passer d’une approche  macroscopique  à une compréhension fine des logiques qui structurent l’univers syndical national.

La diversité présente au sein du champ syndical français  empêche  en premier  lieu de  généraliser trop vite. La compréhension des orientations qui semblent  s’imposer  au sein de cette intersyndicale  à huit – rappelons  que  celle-ci rassemble  la CFDT, la CFTC, la CFE-CGC,  la CGT, FO, la FSU, Solidaires  et l’Unsa  – passe par un décryptage  des logiques  qui président aux  décisions  des  dirigeants  syndicaux  et qui demeurent  perçues  comme  pertinentes  par une  partie des  équipes  intermédiaires,  dans les fédérations  et les structures  territoriales. Elle implique  ainsi de  penser  le syndicalisme en  termes  relationnels, c’est-à-dire  d’intégrer dans le raisonnement  le poids des cultures organisationnelles, les effets de champ  syndical et de  positionnement dans  l’espace  des  relations professionnelles.

Pour  ce faire, nous  nous  proposons  dans  cet article  de  par tir de  questions  courantes  – celles  qui  sont discutées  dans  le cadre  de  la mobilisation,  qui  structurent  le «  sens  commun  militant  » – afin  non  pas  de  prétendre y répondre  de  façon  tranchée,  mais  de  les éclairer sous des angles complémentaires. Il ne s’agit en aucune  manière  de  « justifier » des positions, ni de les « juger » en se parant  de l’extériorité du  chercheur. Nous  voulons  plutôt tenter  d’en  expliciter  les présupposés,  les reformuler  dans  les termes  des  responsables syndicaux, de manière  à délimiter ce qui nous semblerait  être les terrains et les enjeux d’une confrontation  productive. Pour que  la critique des orientations syndicales dominantes produise  des  effets, elle doit  partir des  logiques qui président aux décisions des syndicalistes. C’est  en  prenant  le risque  de  les comprendre, en  restituant  les prises  de  position  des responsables  nationaux  à leurs positions  dans l’espace  syndical, qu’on peut espérer avoir prise sur elles. C’est en dégageant leur rationalité, les cheminements intellectuels  qui les rendent crédibles, qu’on  peut  mettre  en lumière  leurs impasses  et les bifurcations  possibles.

Pourquoi s’enfermer dans une intersyndicale avec la CFDT, la CFTC et la CFE-CGC, au risque de freiner la mobilisation ? Le maintien  d’une  intersyndicale  à huit organisations  constitue  une  démarche   relativement contraignante.  Il suppose  un compromis permanent entre des positions divergentes, aboutissant  à des prises de position  a minima. Ce faisant, ce compromis  minimal  permet  aux organisations  de  conserver certaines  libertés les unes  par rapport aux  autres, et parallèlement  aux porte-parole  syndicaux  de disposer de  marges  de  manœuvre  dans  leurs discussions avec  le patronat  et les pouvoirs  publics, sans  être tenus  vis-à-vis  des  salariés  par des revendications précises. La CFDT, qui s’est retrouvée isolée fin décembre  2008 lorsqu’elle a été la seule organisation à signer l’accord sur l’assurance-chômage, bénéficie  en  outre  grâce à l’intersyndicale  d’une  place  centrale  dans la mobilisation  et le fait savoir. La récupération  d’une  partie des  propositions  de  cette organisation  par  le  gouvernement  (comme le « fonds  d’investissement  social  »)  – réplique  du  scénario  de  2003  –  plane  dès  lors comme une menace plus ou moins précise. L’intersyndicale  ne servirait-elle donc qu’à freiner la mobilisation ? Serait-elle d’abord profitable à l’organisation réputée la moins exigeante vis-à-vis  du  patronat  et du  gouvernement ? Mais  dans  ce cas, comment  expliquer  le fait qu’aucune  organisation  ait envisagé de  sortir de ce cadre ?

On  peut  d’abord  imaginer  qu’en  raison  des crises internes qu’elle a connues, de son affaiblissement  sur le plan  numérique  et militant après 2003 et de son recul relatif aux élections prud’homales  de décembre  2008, la CFDT ne  puisse  pas  se permettre  de  faire cavalier seul avec le gouvernement. L’exaspération  et la radicalisation  sensible  des salariés intiment  les responsables  syndicaux  à faire preuve  de prudence  dans  leurs choix. En outre, entre 2003 et 2008, il y a eu 2006  : l’unité syndicale  sans exclusive  réalisée  contre  le  CPE, à  rebours des  pratiques  traditionnelles, a été  considérée  par les responsables  syndicaux  comme un facteur  essentiel  de la réussite du mouvement. Le cadre  unitaire  constitué  à par tir de la déclaration  commune  du 5 janvier 2009 est par ailleurs original. Les tactiques syndicales routinières  tendent  généralement à sérier les terrains de confrontation  et de négociation. Ici, la plate-forme  unitaire se décline  en plusieurs axes  qui  touchent  autant  aux  revendications pour l’emploi  et les salaires qu’à une réorientation  des  politiques  publiques.  De  la sorte, comme  ne  cessent  de  le présenter  les dirigeants de la CGT, cette intersyndicale  se différencie des précédentes  en ceci qu’elle ne s’est pas constituée  autour du refus d’une réforme en  particulier, mais  qu’elle  esquisse  le projet d’une  politique  économique alternative. Dans la situation  présente,  les potentialités  antilibérales de la mobilisation  syndicale  apparaissent ainsi comme  latentes, portées par la situation bien plus que résultant de la confrontation, au sein de l’intersyndicale, entre deux « camps  ».

Sur tout, la grille de lecture opposant  des organisations « réformistes » à d’autres plus combatives  est  loin  d’être  le principal  cadre  de pensée  de celles et ceux  qui font la politique – au sens  concret  du terme  – des  organisations syndicales.  Il nous  semble  que  ce sont d’autres préoccupations qu’il faut restituer afin de repérer les lignes de partage  et les principes  de  division  qui  servent  de  repères  dans l’élaboration  des orientations syndicales.

La valorisation de l’unité renvoie, tout d’abord, à l’intériorisation par les équipes  dirigeantes de la faible représentativité du syndicalisme français dans le salariat, résultante d’une « crise » dont le taux de syndicalisation  apporterait la preuve objective  indiscutable : 8 % de syndiqués  dans la population  active salariée, soit le taux le plus faible des pays de l’OCDE. Cette approche est particulièrement  prégnante  à la CGT où la question du « syndicalisme  rassemblé  » fournit un des axes stratégiques  de la centrale depuis le milieu des années  1990. Durant la séquence qui a suivi le mouvement social de l’automne 1995, cette  revendication  a servi à la CGT  à relativiser, d’une part, son rapprochement avec la CFDT  (que  rendait nécessaire  sa demande d’adhésion à la Confédération européenne des syndicats) et à se démarquer, d’autre part, de la construction d’un « pôle radical », en lien avec la FSU, Solidaires  et, dans  certaines configurations, FO. De ce fait, le projet de « syndicalisme rassemblé  » n’a jamais été synonyme  à la CGT d’un syndicalisme  de lutte, tourné vers la contestation  des réformes néolibérales. Il renvoie à l’idée que, les facteurs endogènes étant au  cœur  de  la crise du  syndicalisme, celui-ci devrait trouver en lui-même les ressources pour rebondir. L’unité est perçue  comme  une condition  essentielle pour recrédibiliser le syndicalisme. Derrière  cette  analyse  se trouve  la conviction que les salariés se désintéresseraient des syndicats à cause de leurs luttes intestines, de leurs divisions  et, en dernière  instance, de leur politisation. De  ce point  de  vue, les résultats des élections  prud’homales  n’ont pas considérablement modifié  la donne. S’ils confortent la première  place  de la CGT  et conduisent à relativiser l’image de « trois grandes confédérations  » (CGT, CFDT, FO), ils n’ont aucune  raison  d’être  interprétés, en  interne, comme  un signe que la recomposition  syndicale pourrait être accélérée  par une dynamique volontariste  de  rassemblement des  syndicats les plus  combatifs.  D’où  la négation,  dans  le projet  cégétiste, de  relations  privilégiées  avec telle  ou  telle  organisation  pour  des  raisons « idéologiques  » et, au contraire, la mise  en avant  de  relations  diversifiées  et non  exclusives, censées manifester  la volonté de défendre les intérêts des salariés avant des « intérêts de boutique  ».

Au  regard  de  cette  situation, il semble  étonnant que des acteurs plus périphériques,  dont la position n’est pas complètement consolidée dans le champ, n’en contestent pas plus ouvertement  les règles et sur tout les modalités  de fonctionnement implicites. Pour formuler l’idée autrement,  pourquoi  Solidaires  – qui  avait  à plusieurs  reprises  appelé  à la «  grève  générale » en 2003  – ou la FSU – dont  bien  des secteurs  sont  mobilisés, à la fois dans  le primaire  et dans  le supérieur  – ne  font-ils  pas entendre  des  voix  dissonantes  ? De  même, pourquoi  les dirigeants  de  FO  ont-ils accepté l’issue de  l’intersyndicale  du 30  mars alors qu’ils avaient  reçu  mandat  de  leur CCN  de défendre  le principe d’une journée de « grève franche » de 24 h ? Plusieurs facteurs agissent là encore  de  façon  interdépendante. En premier lieu, le précédent  de  la mobilisation  de 2003  a laissé des traces sur le plan individuel et collectif. L’atonie  actuelle  dans  le secteur de l’enseignement secondaire  – outre qu’il est nourri par une position ambiguë  du SNES  sur la masterisation – se comprend  aussi au regard du  sentiment  de  défaite  qui  a suivi les longues semaines  de lutte du printemps  2003. A la suite de celui-ci, le bureau de Solidaires tirait également  un bilan critique sur l’incapacité  de l’organisation  à pousser  la CGT à accélérer  le rythme  du  mouvement, en  raison même  de la difficulté  rencontrée  par  les militants  des différents  SUD  à élargir la grève  dans  leurs propres  secteurs  d’activité. Enfin, la conviction selon laquelle  la CGT détiendrait  les clés d’un appel  à la grève générale  est, paradoxalement, d’autant  plus for te à FO que les responsables de cette organisation récusent toute forme de mobilisation  des  salariés  «  par  le bas  », qui échapperait  d’une manière ou d’une autre à la « démocratie  de délégation  » incarnée par les organisations  syndicales  représentatives.

Un  autre  élément  qui résulte aussi en partie de l’épisode de 2003 est la nécessité pour une organisation  comme  Solidaires  de  se tourner complètement vers son propre  renforcement. Bien que  cela ne soit pas dit explicitement,  la représentation  partagée  de Solidaires  comme structure transitoire dans le cadre d’un mouvement de recomposition  plus large a perdu  de son actualité  et revêt moins  de sens pour les militants  investis  notamment   dans  les  SUD. C’est bien une nouvelle  confédération,  même si elle ne porte pas ce nom, qui est en construction. Il en résulte un travail militant de type différent  – et l’intense  préparation  des  élections prud’homales  l’a bien  montré  –, moins tourné  vers la jonction  avec  d’autres  mouvements sociaux et davantage guidé par les contraintes des luttes de positions dans le champ syndical. Les Solidaires locaux ont mené ce combat  au quotidien  pour  obtenir  une  place dans les intersyndicales  au niveau  des villes, ce qui semble  aujourd’hui  relativement  acquis. La direction  nationale  de  Solidaires  le fait également depuis plus d’une décennie  et de ce fait, le « coût  » de  sortie ou de  démarcation  de l’intersyndicale  à huit peut  apparaître  comme trop important ou contre-productif au regard de ces efforts accumulés pas à pas. Le choix qui est alors fait – et qui suscite des débats importants dans  l’organisation  – est celui d’investir la mobilisation  au niveau  local, en multipliant les initiatives et les formes  d’action, mais sans bousculer  le cadre  unitaire  à l’échelon  national. Plus  largement,  la conscience  des  coûts d’une  éventuelle  marginalisation  et l’insistance mise  par chaque  organisation  sur son propre renforcement  s’est exacerbée  après l’adoption de la loi du 20 août 2008  modifiant  les règles de la représentativité  : en substituant les résultats électoraux  au  principe  de  présomption irréfragable,  la réforme  impose  à tous, sous peine  de  disparaître, un  redéploiement militant, voire des  rapprochements organisationnels. Des  effets  importants sont  attendus  de l’application  des nouvelles  règles de représentativité – réforme  qui a été portée conjointement  par la CGT  et par la CFDT  -, mais  en termes  « d’assainissement  » du champ,  c’est- à-dire  de  réduction  de  sa pluralité  interne  et de renforcement  des organisations  qui seront capables  de  mobiliser  les salariés sur le plan électoral. La situation de la FSU est sans doute plus  spécifique,  dans  la mesure  où  des  logiques  centripètes,  celles  des  syndicats  nation- aux, l’emportent aux dépens  de la fédération. L’éventualité d’une sortie de l’autonomie, c’est- à-dire de l’entrée dans une confédération  – en l’occurrence  la CGT  –, apparaît  comme  une possibilité  pour une  partie des militants et se cristallise peu à peu en ligne de clivage interne, dans un contexte  de crise de la fédération  et de fonctionnement déficient  de celle-ci.

Pourquoi ne pas battre le fer quand il est chaud en lançant un mouvement de grève reconductible et intersectoriel ? Eclairer au moins en partie les raisons qui conduisent  au maintien  de  cette  intersyndicale  à huit n’explique  pas  complètement la relative timidité des syndicats quant aux modalités d’action  choisies  avec  la succession  de  jour- nées de mobilisation.

Une  formule  est  devenue  rituelle parmi  les cadres  syndicaux  : « la grève  générale  ne se décrète  pas  ». Si  ce  genre  de  propos  sert souvent  à  disqualifier  une  telle  perspective  comme  étant  irréaliste a priori, elle  n’en contient  pas  moins  une  part de  vérité. À la différence  d’autres traditions syndicales dans le monde, le syndicalisme français se distingue par sa faiblesse structurelle en matière de mobilisation coordonnée des travailleurs. La distinction précoce  des  activités  syndicale  et mutualiste, la prise en charge de la protection  sociale par des  organismes  étatiques  ou  paraétatiques, un droit du  travail n’autorisant  aucune  dérogation  conventionnelle ou législative  au bénéfice des  syndiqués  ont historiquement  borné le syndicalisme  français au terrain revendicatif, le privant ainsi des masses  d’adhérents  « captifs » qui  ont  fait la force  des  syndicalismes belge, allemand  ou scandinave . De  ce fait, les syndicats  français  n’ont pas  les ressources ou le degré de centralisation des organisations d’autres  pays. En dehors  de  secteurs  professionnels  délimités  se faisant  de  plus  en  plus rares, les organisations  syndicales  n’ont pas les moyens militants de construire une grève de manière  volontariste, ni les moyens  matériels de la tenir (à l’aide, par exemple, de caisses de grève  conséquentes). Si des  impulsions  syndicales  furent  à l’origine d’importants épisodes de  grève,  particulièrement  dans  le  secteur public (de 1953  à 2003, en passant par 1995), les deux  principaux  épisodes  de  mobilisation interprofessionnelle,  en  1936  et 1968, furent quant  à eux largement  spontanés.

L’absence  relative de mobilisation  dans le secteur privé et la crainte de renforcer la représentation  dominante  d’un  secteur  public  comme lieu privilégié de la grève est un motif qui a pu guider, en 2003, la stratégie suivie par la CGT. Si ce type  de représentation,  largement  diffusée par les médias, repose sur une connaissance partielle et en partie erronée de ce qui se passe dans les entreprises privées, il n’en reste pas  moins  que  le clivage  public/privé  joue en  interne, qu’il est intériorisé  par  une  partie des  directions  syndicales. L’hypothèse d’un « déphasage » avec ce que vivent les salariés du privé, d’une  incompréhension relative de ces derniers par rapport aux stratégies  et aux discours syndicaux, est souvent  présentée comme  l’une des raisons de la faible syndicalisation. À nouveau,  la prégnance  du thème  de la crise du syndicalisme  se fait ici sentir. Celle- ci entrerait en résonance  avec  une  crise plus large des identifications  collectives. Les salariés se seraient ainsi d’autant plus éloignés des organisations  syndicales  qu’ils seraient  devenus plus individualistes.  En 1995, la notion  de « grève par procuration  » avait été proposée pour souligner le rapport ambivalent  des salariés à l’action collective. Après ce mouvement, une  partie des  organisations  qui  avaient  été à la pointe  du mouvement (CGT et FO)  ne connurent  pas de remontée  de leurs effectifs. C’est au contraire la CFDTqui tira son épingle du jeu grâce à la continuité  d’une politique  de développement inspirée des méthodes managériales. L’inversion de la courbe de ses effectifs, qui lui permit de retrouver en 2002 le nombre maximum d’adhérents qu’elle avait atteint au milieu des années  1970, semblait  conforter une stratégie de resyndicalisation pensée dans les termes du pragmatisme, de proximité et de services aux adhérents. La condamnation des actions minoritaires et l’impératif de modération se justifient, dès lors, par la nécessité de renouer avec une progression  des effectifs. La construction  d’un  tel raisonnement,  tel qu’il peut  être avancé  par la direction  confédérale de  la CGT, reproduit  effectivement sur certains  points  des  arguments  qui  ont  alimenté le processus  de  recentrage  dans  la CFDT, à l’orée des années  1980. La direction  confédérale de la CGT s’oppose  ainsi ouvertement  à l’idée d’une grève générale et reconductible  ; si elle « comprend  » les actions  radicales  comme  les séquestrations,  elle met  en garde  ses militants contre leurs limites et leur instrumentalisation par des minorités « politiques  » ; et elle évoque  des formes d’action nouvelles, plus « médiatiques », censées conquérir « l’opinion publique  ».

La  situation  actuelle  se  différencie  pour tant des séquences conflictuelles antérieures en raison  de  mouvements de  grèves  dans  les entreprises  privées,  de  la  visibilité  médiatique  des  formes  d’action  qui  y sont  menées et d’une  participation  effective  de ces salariés aux  grandes  journées  d’action. Les effets  de la crise ne  créent-ils  pas  justement  les conditions  pour  dépasser  le clivage  public-privé par des  mots  d’ordre  communs,  notamment sur le plan  des  revendications  salariales ? On pourrait  donc  penser  que  le préalable  de  la mobilisation  du  privé  pèse  d’un  poids  beau- coup  plus  réduit dans  l’élaboration  des  stratégies  syndicales.  C’est peut-être  le cas, mais d’autres  considérations  qui, là encore  ne sont pas nouvelles, contribuent à cet évitement d’une situation de confrontation  ouverte avec le gouvernement. Pousser  l’épreuve  de  force jusqu’à la grève générale, c’est risquer d’entrer dans une logique de délégitimation du pouvoir politique. Or, pour la quasi-totalité  des organisations  membres  de l’intersyndicale, le fait de se retrouver de facto dans le rôle d’une opposition au gouvernement est une situation à éviter, et ce d’autant plus que la logique même  de l’intersyndicale, qui met  en cause  la politique économique du sarkozysme, porte en soi un potentiel  important de  politisation. Elle a par exemple  donné  prise à l’appel unitaire des dix organisations de  la gauche  anticapitaliste en soutien aux mobilisations  du 29 janvier. Au lendemain  de  cette  date, les responsables de  la CFDT mettaient en garde contre le risque de « globalisation  ». La croyance dans l’autonomie du champ  syndical  va de pair avec  cette idée que la politisation du mouvement conduirait à déporter les syndicats vers un terrain qui n’est pas le leur ou, du moins, qui ne doit plus l’être. On  rencontre  ici un  autre  aspect  d’un  sens commun  syndical structuré par l’omniprésente crise du syndicalisme, tant les équipes  dirigeantes que de nombreux  militants de terrain ont intériorisé  la nécessité  d’une  nette coupure entre syndicalisme et politique. La défiance qu’expriment au quotidien  nombre  de  salariés à l’égard du personnel politique incline d’autant plus les syndicalistes  à se démarquer de cet univers, ce qu’ils traduisent d’abord  par une  mise  à distance  des  partis politiques  et des « idéologies  ».

Ce rapport actuel au politique est à comprendre dans sa complexité. Ce qui ressort notamment des actions et des prises de position de la direction  confédérale de  la CGT  depuis  le milieu des années 1990, donc depuis l’ère Viannet, est une  adhésion  renforcée  – une  illusion – aux principes  de fonctionnement du champ syndical et, plus largement, à l’idée d’une autonomie relative de l’espace des relations professionnelles. La remise en cause des liens avec le PCF et la crise de celui-ci s’est traduite pour la direction de la confédération  et pour une partie des équipes  syndicales par la disqualification de l’idée même  d’un projet de société ou d’un programme ayant une envergure politique. S’en tenant à des « repères revendicatifs  », la CGT entend ainsi se prémunir de toute dépendance par tisane et laisser derrière elle la logique  de courroie  de  transmission. Cette  position  est loin de faire l’unanimité  en interne, qu’elle soit combattue  de façon explicite par des militants qui, de  fait, transposent  une  partie des  luttes internes du PCF dans  la CGT ou qu’elle soit démentie,  en actes, par des  militants  qui transfèrent  aux  élus la responsabilité  de  faire de « bonnes  lois » (comme  celle de renationaliser EDF  et GDF), dans  l’attente  d’un nouveau  gouvernement d’une  hypothétique gauche  plurielle.

Ce qui compte  avant tout pour la direction de la confédération,  relève  de la position  interne dans ce champ  et du fait d’en être complète- ment  partie prenante,  en  s’appuyant  sur les canaux  de légitimité spécifiques  qu’a engendré son institutionnalisation  : les élections  professionnelles et les multiples positions de pouvoir situées dans les institutions sociales, par opposition à une intervention directe dans le champ politique  spécialisé. Cette démarcation se traduit également,  au  plan  symbolique,  par une certaine neutralisation  du discours syndical, les porte-parole  d’organisation  récusant  un registre « idéologique  » (marxiste) qui risquerait de les attirer vers leur passé autant que les situer sur le même  terrain que  certains acteurs  du champ  partisan. Inversement,  la contrepartie d’une  certaine  «  radicalisation  »  de  FO  au plan  confédéral,  depuis  le milieu  des  années 1980  – dont témoigneraient ses appels  devenus récurrents à la grève générale  interprofessionnelle  – c’est justement  la préservation  de cette illusion d’un monde  syndical  totalement déconnecté  du monde  des partis. De ce point de vue, aussi bien les différentes  composantes  de Solidaires  que  des équipes  syndicales au sein de la CGT – prêtes à assumer  un autre  discours  ou  la contestation  sociale  est nécessairement politique  – se retrouvent  en décalage  avec la vision présentée  comme  légitime, par les directions confédérales,  du statut des syndicats dans la société.

À la différence de celle de la CFDT, l’orientation de la CGT  reste cependant ancrée  dans  une rationalité  économique alternative  – comme, dans une certaine mesure, celle de la confédération FO. Cette posture  est valorisée  par les dirigeants  cégétistes  auprès  de  leurs militants comme  étant plus exigeante  que celle de leurs concurrents. Elle n’en  conduit  pas  moins, en excluant un affaiblissement du pouvoir politique tel qu’il puisse entraîner sa chute, à subordonner la mobilisation  à la négociation  plutôt que l’inverse. La légitimité  supposée  du syndicalisme dépendant de sa capacité à exister comme « partenaire social », éventuellement exigeant, mais responsable, les calculs des représentants syndicaux  sont bornés  par les arènes  du dia- logue social : leurs temporalités  et leurs attentes s’ajustent  à celles  de  leurs interlocuteurs, pouvoirs  publics  et employeurs,  plus  qu’aux demandes des  salariés. Un  élargissement  du conflit au-delà  des arènes institutionnalisées  du dialogue  social risquerait en effet de mettre en cause  les frontières  apparemment stabilisées entre les ordres d’activité – ce qui est le propre d’une crise politique. La ligne d’action partagée par la plupart des équipes  syndicales dirigeantes  repose  ainsi sur l’hypothèse  que des  négociations  puissent  s’ouvrir sur divers chantiers, entraîner  des  échanges  assez  longs, et nécessiter une mobilisation  de longue haleine. D’où  l’intérêt de  maintenir  une  pression suffisamment for te sur le gouvernement et le patronat  pour les contraindre  à négocier, mais suffisamment espacée  pour éviter toute dynamique  de « débordement ». C’est dans  cette optique  qu’après  l’échéance  du 1er mai, il est question d’une nouvelle journée d’action un samedi  de juin.

Cette valorisation du « dialogue  social » comme seul horizon auquel puisse prétendre le syndicalisme  – loin d’un projet de changement radical de société – ouvre d’autres pistes d’analyse.  Finalement,  le syndicalisme  français, malgré  sa diversité interne, n’est-il pas en train de s’engager  sur la voie d’une  politique  de pactes sociaux, soit d’échanges ritualisés et canalisés entre le pouvoir et des représentants professionnalisés  du  monde  du  travail ? C’est à une forme d’intégration durable du mouvement syndical  dans les modes  de régulation du système capitaliste que nous assisterions, intégration  qui  se traduirait  dans  les modes  de pensée  des responsables  syndicaux, dans leur façon d’envisager à la fois la légitimité de  leur organisation,  mais  aussi  les possibles qui  s’ouvrent  à elle. Pour  autant,  si tant  est qu’on  puisse  le constater  sur un temps  relativement  long, le paradoxe  d’un tel processus d’intégration est qu’il s’opère à contre-courant des  évolutions  dans  d’autres  pays  européens. Des pratiques durablement installées de « pactes sociaux  » ont  justement  été  remises  en cause  ou dénoncées par une  partie des  syndicats en raison même  de leur per te de con- tenu dans le régime  de production  néolibéral. Celui-ci, à la différence  de  ce que  permettait le  keynésiano-fordisme, n’accorde,  en  effet, aucune  place  au compromis  social. Dès  lors, l’implosion de ces stratégies de négociation nationale  a donné  lieu soit à une  intégration renforcée d’un mouvement syndical coupé des formes de conflictualité et co-gestionnaire  de la crise, comme  en Espagne, soit à un redéploiement critique de certaines organisations ou de composantes de  ces dernières. Les exemples allemand  et belge  sont ici intéressants, car ils renvoient à des formations sociales où ce type de politique, rendue  possible  par la puissance du mouvement social-démocrate ou socialiste, a été mené et connaît aujourd’hui une profonde mutation. La remise en cause des liens avec le SPD  et l’implication  de syndicalistes  dans la création de Die Linke atteste d’une reconfiguration partielle du rapport au politique  et de la recherche  de nouvelles  alternatives.

Les transformations du syndicalisme français, liées au repositionnement dans  le champ  des relations  professionnelles  d’une  partie de  ces composantes,  telle la CGT, conduiraient-elles à mettre en place en France une politique d’intégration qui apparaît tant du côté des détenteurs du capital que des organisations syndicales  comme  un  outil dépassé  dans  les autres  pays  européens ? Si les logiques  poli- tiques  et syndicales  peuvent  se rencontrer  ici – l’une valorisant un contrôle de la conflictualité et du  « coût  » du  travail, l’autre sa légitimation  institutionnelle  – il n’est pas  certain qu’un tel scénario soit appuyé  par le patronat en  France. De  plus, bien  qu’elle  présente  le mérite de déplacer  la focale vers des facteurs plus macro, une telle analyse n’a de sens qu’en étant articulée à une compréhension plus fine de  l’univers syndical  national. De  ce point  de vue, il convient  de  ne pas  conclure  trop vite à l’emprise du modèle  de concertation sociale sur des  organisations  dont  une  partie des militants  restent marqués  par la matrice  d’un syndicalisme  de lutte. Des résistances multiples existent  en leur sein et interdisent  de penser ces évolutions  en termes linéaires.

Plutôt  que  d’accuser  les directions  syndicales de refuser une stratégie ascendante  de mobilisation, nous  espérons  avoir montré  l’intérêt de  se demander  pour  quelles  raisons  elles la refusent. Nombre  de  syndicalistes, aux  différents niveaux  des  hiérarchies  organisationnelles, sont  marqués  par une  conscience  aigue de  la fragilisation  du  syndicalisme,  coordonnées  qu’oublient  parfois  certaines  critiques. Mais cette omniprésence de la crise syndicale, prisme à travers lequel les équipes  dirigeantes abordent  les enjeux de la crise capitaliste, con- duit souvent  à accepter  comme  allant de  soi certaines  prémisses  qui demanderaient pour- tant à être discutées. Si la crise du syndicalisme est loin de  n’être  qu’un  fait de  discours, les effets  rétroactifs de ce discours  sont d’autant plus certains que  les organisations  syndicales tendent  à se déposséder  de  leurs capacités critiques. Cet enjeu  est particulièrement  visible dans le positionnement de la direction confédérale  CGT. Sa  rupture  avec  l’idée  que puissent  exister des  « intérêts  objectifs  » de la classe ouvrière dont l’organisation  syndicale serait en quelque sorte le représentant  « naturel » (avec le Par ti), l’a entraînée vers l’extrême inverse. Le syndicalisme  s’étant coupé  des travailleurs du fait de  son institutionnalisation,  le seul remède à sa crise serait de se mettre simplement  « à l’écoute des salariés ». Un tel raisonnement  a par exemple  motivé la signature de la « position  commune  » sur la représentativité. Mais en fondant  la légitimité  syndicale sur le critère exclusif  des  résultats  aux  élections professionnelles,  c’est une représentation des travailleurs comme des citoyens-salariés saisis dans leur individualité  qui se trouve confortée. Cette  philosophie  sociale, congruente avec  les formes  instituées  de  la démocratie libérale  et représentative,  réduit la formation de la volonté  collective à l’agrégation  des préférences  individuelles,  et son  expression  à la parole  de professionnels  de la représentation. En  même  temps  qu’ils renoncent  aux  certitudes d’un objectivisme classiste (hâtivement assimilé  par  certains  au  «  marxisme  »), les syndicalistes  en viennent  ainsi à voir dans  des objectivations  concurrentes  (celle de l’opinion publique  ou celle des « experts ») les intérêts « spontanés  » des  salariés, sans  questionner les processus  de fabrication  qui sont derrière ces expressions « naturalisées ». Pour dépasser cette  injonction  contradictoire  entre  les logiques  de l’action militante  et celle de l’opinion publique, entre les nécessités  de convaincre  et de  se conformer,  il importe de  réhabiliter  le caractère nécessairement conflictuel de la définition des intérêts et les dynamiques  collectives  qui  permettent  de  les faire exister. C’est pourquoi  il est vital que la conflictualité sociale rencontre de nouvelles formes de conflictualité idéologique,  et que celles-ci trouvent des canaux de diffusion au sein du monde  syndical. En outre, et c’est là que  s’identifient  travail intellectuel et travail militant, un savoir critique sur le syndicalisme  ne trouvera  ses conditions  de réception  que  dans  la revitalisation  de cadres de  débat  démocratiques, autrement  dit, de véritables dispositifs d’intersubjectivité fixant eux-mêmes leurs  propres  limites, sans  que certaines questions  soient proscrites a priori parce que considérées  comme  politiques.

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