De 5000 à 10 000 manifestants ont participé à l’action non-violente et légale « Reclaim Power » ce mercredi 16 décembre. Compte-tenu de la psychose sécuritaire régnant à Copenhague et des provocations multiples des autorités danoises vis-à-vis de cette initiative portée par les coalitions Climate Justice Action et Climate Justice Now, c’est une nouvelle réussite, après l’immense manifestation du 12 décembre qui fera date.
Comme l’on pouvait s’y attendre, la police danoise a réagi de manière violente et complètement disproportionnée en multipliant les arrestations arbitraires, dont celle d’un Français, Nicolas Haeringer, membre du comité de rédaction de Mouvements et porte-parole du Mouvement pour une Alternative Non-Violente. C’est intolérable. Nous exigeons des autorités qu’elles cessent ces provocations incessantes. L’action Reclaim Power visait à bousculer les négociations officielles en créant un « Forum des Peuples » pour faire entendre celles et ceux qui sont ne sont jamais écouté-e-s et pour imposer notre propre agenda et nos solutions.
Alors que les négociations piétinent, que la présidente de la Convention démissionne, que les pays du Nord refusent de reconnaître leurs responsabilités historiques, que l’Union Européenne revoit ses promesses à la baisse, que la France manœuvre vilement pour acheter le soutien de l’Afrique etc… il est plus que temps d’agir pour que les négociateurs entendent les revendications des mouvements sociaux et écologistes. Loin de réclamer la fin des négociations, notre action vise à exiger un “bon accord“, qui engage de façon contraignante les pays à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre à hauteur au minimum des recommandations du GIEC, qui reconnaisse la responsabilité historique des pays du Nord et qui dégage les fonds nécessaires à l’adaptation et à la conversion énergétique des pays pauvres. Nous portons également les revendications suivantes : pas de solutions basées sur le marché, laisser les ressources fossiles dans le sol, contrôle démocratique des populations sur les ressources naturelles, relocalisation des productions, réduction des surconsommations notamment du Nord, reconnaissance de la dette écologique contractée auprès des pays du Sud, reconnaissance des droits des populations indigènes.
Loin de chercher à nous entendre, l’ONU et les autorités danoises remettent en cause le caractère démocratique et transparent affiché de la COP-15 et la possibilité pour toutes les voix dissidentes de se faire entendre : réduction drastique des accréditations ces mardis et mercredis pour atteindre à peine 1000 puis 90 accréditations jeudi et vendredi pour l’ensemble des ONG et mouvements sociaux, interdiction d’entrée arbitraire depuis ce mercredi matin pour des ONG, comme les Amis de la Terre, ou mouvements perçus comme une « menace » pour le bon déroulé des négociations, … Au final, la COP se referme sur les seuls chefs d’Etat sans que les ONG, les populations indigènes, les mouvements sociaux et plus largement tous les représentants de la « société civile » puissent faire entendre leurs voix. Nous condamnons ces agissements et nous continuerons à faire entendre toutes les voix qui ne peuvent plus s’exprimer librement.
Maxime Combes
16 déc : « Peoples Assembly to reclaim power »
Suite à l’immense succès de la manifestation de samedi – manifestation qui fera date et qui marque l’arrivée massive des mouvements sociaux dans la bataille climatique, depuis dimanche, les mouvements sociaux et écologistes maintiennent la pression sur les négociations en multipliant les actions de rue et interventions au Bella Center. Aujourd’hui mardi 15 décembre, sera dénoncé l’agrobusiness qui participe fortement au réchauffement climatique sans résoudre la faim dans le monde et tout en enrichissant quelques riches propriétaires et multinationales.
Le 16 décembre, à partir de 8h, organisée par les coalitions Climate Justice Action et Climate Justice Now !, l’initiative « Peoples Assembly to reclaim power » mêlera des actions de rue au plus près du Bella Center et des interventions à l’intérieur même des négociations. L’objectif sera de bousculer les négociations officielles en créant un espace IN-OUT afin de faire entendre celles et ceux qui sont ne sont jamais écouté-e-s et pour imposer notre propre agenda et nos solutions : pas de solutions basées sur le marché, laisser les ressources fossiles dans le sol, contrôle démocratique des populations sur les ressources naturelles, relocalisation des productions, réduction des surconsommations notamment du Nord, reconnaissance de la dette écologique contractée auprès des pays du Sud, reconnaissance des droits des populations indigènes.
Des militant-es des organisations du collectif français Urgence Climatique Justice Sociale y participeront, aussi bien à l’intérieur du centre de négociations qu’à l’extérieur.
Maxime Combes
Reclaim Power action. Le chaos et l’incompréhensible violence de la police danoise
Amelimelo le mer, 16/12/2009
En arrivant à 8h ce matin nous apprenons que la totalité de la délégation des Amis de la terre International est interdite d’accès au centre de conférences. C’est la consternation, et un très mauvais signe pour la suite de la journée. La mise en place de l’action Reclaim Power démarre et la tension monte rapidement. José Bové, en voulant plaider la cause des Amis de la terre aux côtés de leur Président Nimmo Bassey, est embarqué par la sécurité du Centre de conférence et y demeure enfermé un moment. De nombreux observateurs d’ONG restent coincés à l’extérieur bien qu’ils soient en possession des incontournables badges de niveau 1 et 2.
Côté Reclaim Power, deux actions coordonnées doivent converger. L’une à l’intérieur du Centre de conférences autour du réseau CJN, l’autre, une marche partie depuis 8 heures et rassemblant plusieurs milliers de personnes, dans les environs du Bella Center. Les deux espèrent tenir une assemblée populaire sur le lieu de leur convergence, à quelques cent mètres de la porte du centre. C’est le sens de l’action : réunir les insiders et les outsiders qui appellent à un accord contraignant, une responsabilité différenciée du Nord et du Sud, des transferts financiers à long terme et surtout un changement radical du modèle économique en vigueur et leur donner l’occasion d’exprimer, ensemble, leurs critiques et leurs propositions. L’action « in » doit aussi porter la voix du réseau CJN et de ses membres, organisations paysannes, féministes, indigènes… auprès des nombreux délégués officiels présents.
Sur ce dernier plan c’est un succès. Dès le départ de la marche dans les couloirs du BC, une foule de journalistes, micros, caméras, appareils photos, se masse autour du groupe d’activistes, et les suivra jusqu’à leur sortie. Plus d’une centaine de personnes participent à l’action, qui met tout le centre en ébullition. Mais la convergence n’aura pas lieu.
La violence de la police danoise s’est abattue depuis une heure sur les manifestants à l’extérieur. Des manifestants ont été arrêtés avant même son arrivée au Bella Center. La marche partie de l’intérieur de la conférence se trouve bloquée sur le pont qui la sépare du premier groupe, et les CRS locaux tabassent les militants à leur portée. De l’autre côté des barrières, les manifestants bloqués sont violemment malmenés par la police. Des centaines d’arrestations, des blessés aussi.
Les forces de l’ordre se transforment en agents de violence et de chaos. La police danoise déchaîne une répression disproportionnée sur des groupes de manifestations résolument pacifiques, venus se rejoindre en chantant et battant fanfare aux cris de « Climate Justice Now », « Reclaim power » et « Join the people assembly ».
Après l’exclusion de 95% des observateurs de la société civile pour les deux dernières journées du Sommet, une telle attitude jette un discrédit profond sur le caractère réellement démocratique des Nations unies et des négociations climatiques qui s’opèrent dans leur cadre. La participation des mouvements sociaux et citoyens à la CCNUCC et aux différents COP et leurs réunions préparatoires a toujours été garantie, contrairement à d’autres organisations ou directoires, tels l’OMC ou le G8. Les ONG et les mouvements sociaux ont toujours salué les efforts de la CCNUCC et développé des relations de collaboration et de confiance avec son secrétariat.
Dans ce contexte le traitement infligé aux mouvements citoyens depuis deux jours apparaît incompréhensible. Des militants et proches d’Attac ont été molestés, battus, embarqués manu militari et on est toujours sans nouvelles d’eux à 16h45 ce 16 décembre. Images ahurissantes de militants traînés par terre, menottés dans le froid glacial, frappés avec acharnement par des policiers les poursuivant jusque sur le toit des véhicules… Ou comment rendre agressifs et paranoïaques les mouvements au Nord et au Sud qui se battent en toute légalité pour la justice climatique, et qui veulent simplement pouvoir se faire entendre…
Impossible désormais d’entrer dans le centre de conférences. Les ONG sont admises sur des critères définis à discrétion et leurs illustres représentantes pleurent leurs privilèges (c’est ce qui arrive quand la plèbe veut se mêler des affaires des élites) ; vous zen faites pas les filles, ya une vie après le lobby, c’est moins glamour, ça brouille le teint, casse les ongles et fait froid aux pieds mais le parfum de l’insurrection peut chavirer les médias les plus récalcitrants. Alors que la marche, bloquée toute la journée, s’apprête à rejoindre le Klimaforum, des véhicules de police déferlent dans le quartier. Tadzio Muller (voir post d’hier) est sur le point d’être jugé à huis clos.
À Copenhague, la grande braderie de l’Union européenne
Attac France
Communiqué du 15 décembre 2009
Alors que la COP15 s’approche de l’échéance, l’Union européenne revendique son rôle de leader du climat mais revoit ses promesses à la baisse.
Lors d’une conférence de presse tenue hier au Bella Center, l’Union européenne a douché les espoirs des plus optimistes, ou des plus crédules, quant aux positions qu’elle tiendra dans la dernière ligne droite de négociations à Copenhague.
Alors qu’elle était initialement favorable à la préservation d’un accord contraignant qui assignerait une seconde période d’engagements de réduction d’émissions aux pays industrialisés, l’UE se range de fait aujourd’hui derrière la position des États-Unis qui refusent un traité contraignant pour les pays riches. Et ceci en opposition avec les demandes renouvelées du G77 et de la Chine, soucieux d’obtenir des garanties explicites de la part des pays riches qui ont trop souvent manqué à leurs promesses (Objectifs du millénaire, lutte contre le sida, lutte contre la faim) ou qui reprennent de l’autre main dix fois les sommes dérisoires concédées à force de harcèlement (remboursement de la dette, évasion fiscale par exemple). Pour se justifier l’Union européenne avance l’argument qu’elle ne peut être seule à s’engager alors que les États-Unis ou l’Australie resteraient en dehors de tout système contraignant.
Elle a également annoncé qu’elle s’engagerait sur une diminution des émissions à hauteur de 23% entre 1990 et 2020. Elle semble donc avoir abandonné la promesse de passer à 30% de réduction si d’autres pays s’engageaient, alors que les propositions nouvelles du G77, appuyées sur les recommandations scientifiques, se chiffrent à 52% de réduction d’émissions entre 1990 et 2017. Le G77 propose une réduction de 80% pour 2030 et 100% en 2050, ce qui correspondrait à un réchauffement de plus 1,5° maximum.
Enfin l’Union européenne propose un financement d’urgence de 2,4 milliards d’euros d’ici 2012, ce qui soulève la colère des pays du Sud, qui ne demandent pas la charité mais la reconnaissance d’une dette écologique. Aucune solution de financement à long terme n’est par ailleurs avancée. Cette faiblesse des financements publics illustre la priorité donnée aux marchés du carbone pour assurer le financement de la lutte contre le changement climatique.
Attac reste opposé aux marchés du carbone, car ils sont inefficients et contre-productifs. Ils offrent de nouvelles opportunités de spéculation aux acteurs de la finance. Et grâce aux mécanismes de compensation, ils permettent aux pays riches d’atteindre leurs objectifs sans rien changer à leurs modèles de développement.
L’Union européenne a joué un rôle important au moment de la signature du protocole de Kyoto, et continue de revendiquer une auréole de leader dans la lutte contre le changement climatique.
Nous appelons donc les États membres à se ressaisir et à écouter ceux pour qui le changement climatique n’est pas une abstraction mais une réalité vécue au quotidien, alors qu’ils n’en sont pas responsables.
Contacts presse :
A Copenhague :
Christophe Aguiton : 0045 52713665
Amélie Canonne : 0045 52646697
En France :
Geneviève Azam : 0033 662225158
Enlisement des négociations et répression des activistes à la veille de l’Assemblée des peuples.
Fanny Simon
15/12/2009
Des négociations en berne … :
Les négociations pour un accord à Copenhague ne semblent guère avancer, à quelques heures de l’ouverture du Haut Segment. Les pays du Sud continuent de faire pression pour le maintien du Protocole de Kyoto, seul accord juridiquement contraignant, et la signature d’un autre accord sous la Convention. A l’inverse, les pays développés poussent en faveur de la signature d’un seul accord, placé sous la Convention et engageant tous les pays, ce qui signifierait l’abandon du Protocole de Kyoto remplacé par une simple déclaration politique. Pour ces derniers, ils réclament un engagement symétrique de tous les pays développés (sous-entendu les Etats-Unis), ainsi qu’un engagement des pays émergents (notamment la Chine) prétextant que sans un tel accord leurs efforts seraient vains. D’après le dernier communiqué de l’Union européenne (en date du 15.12.09), les objectifs de l’Union européenne de réduction des émissions de GES de 30% d’ici 2020 par rapport à 1990, seraient désormais soumis à ces conditions :
« As part of a global and comprehensive agreement for the period beyond 2012, the EU reiterates its conditional offer to move to a 30% reduction by 2020 compared to 1990 levels. This offer is dependent on other developed countries committing themselves to comparable emission reductions, and on developing countries contributing adequately according to their responsibilities and respective capabilities »(source :http://www.se2009.eu/polopoly_fs/1….)
Quant aux difficultés rencontrées pour la deuxième phase du Protocole de Kyoto, Yvo de Boer et Connie Hedegaard (Présidente danoise de la COP 15) répondaient ce matin lors de la conférence de presse, qu’à la différence de Kyoto (1992), il s’agissait désormais d’obtenir un accord global qui ne pouvait se passer des Etats-Unis … Cela ne laisse présumer rien de bon sur la suite des négociations, et encore moins si l’on s’en tient aux récentes déclarations d’Hilary Clinton : « La croissance des émissions dans les 20 années à venir viendra du Sud. Sans leur engagement, rien n’est possible » (source : http://twitter.com/Libe_Copenhague).
… Et une répression de plus en plus forte des activistes à la veille de « Peoples Assembly to reclaim power » :
Après les événements d’hier à Christiana (210 personnes arrêtées dont 80 du groupe non violent yabasta), la répression des activistes par la police danoise continue de sévir : arrestation de Tadzio Muller (un des pilliers du CJA) à sa sortie du Bella Center par des policiers en civil ; contrôle de police à la Candy Factory (lieux d’accueil du Bike Bloc) en fin de matinée (1 personne arrêtée et saisie de certains vélos) ; une vingtaine de « désobéissants » arrêtés près du Klimaforum ; et d’autres personnes arrêtées suite à un sitting de contestation (pas de chiffre précis, ni le lieu de cette opération). [Pour plus d’informations à ce sujet, voir le post de Nicolaz ci-dessous].
Les activistes appellent à ne pas se laisser intimider par les provocations de la police danoise, et à venir en nombre pour la mobilisation non violente de demain.
Seconde semaine : la tension monte ;
amelimelo
15/12/2009 – 13:51
Tentative de sortie de trois jours de problèmes logistiques.
Vol de carte d’accréditation pendant le week end = cinq heures d’attente dans la cohue des milliers de personnes arrivées hier matin dès 6h pour obtenir le précieux badge de l’UNFCCC.
La rigueur des policiers danois confine à l’ubuesque : après une heure d’attente dans la file des accrédités qui attendent les contrôles de sécurité, ils me renvoient dans celle des non-accrédités, bloqués par une panne du système informatique et le dépassement des capacités d’accueil du Bella Center.
J’entame 4 heures de station debout, écrasée par la foule pressée d’atteindre le Saint des saints, affamée et transie de froid. Je rencontre des gens sympathiques, une journaliste de la radio publique luxembourgeoise à qui je développe les positions d’Attac sur le sommet de Copenhague et la crise climatique, un syndicaliste de la CSC belge (Confédération européenne des syndicats), nous échangeons des nouvelles d’amis communs… des représentants des multinationales aussi, le lobby chevillé au corps, qui tentent de convaincre leurs voisins de queue du rôle déterminant des entreprises dans la lutte contre le changement climatique.
Près de moi patiente un représentant de la Ligue internationale pour la conservation de la nature qui argumente doctement auprès de ses voisins sur la nécessité urgente de mettre en place des politiques drastiques de limitation des naissances, la surpopulation étant la cause première du réchauffement climatique selon son organisation. Dans le même temps il reconnaît la responsabilité des pays du Nord dans la crise écologique… Va comprendre.
Les consignes de sécurité sont encore montées d’un cran autour du Bella Center. L’arrivée imminente des chefs d’Etat et de gouvernements et l’incroyable affluence de la presse et de la société civile compliquent la vie de la CCNUCC et de la police danoise. 15000 places pour 46000 accrédités, des contrôles de sécurité intérieurs, scan’ des badges de niveau 1 et 2… La foule est hagarde et furieuse à l’extérieur. La masse se transforme en confusion et la confusion vire à la colère… Des protestations spontanées s’organisent autour du slogan « let us in » (Laissez nous entrer).
Je suis dans une situation compliquée. Je dois rentrer dans le Bella Center avant 18h et la rumeur circule que plus personne n’y pénétrera aujourd’hui. Mon rôle de chef de délégation d’Attac France me confère moins d’honneurs que d’épreuves à vrai dire : je dois en effet retirer les badges de second niveau qui permettront à Attac d’accéder au Bella Center dans les jours qui viennent, pour un tiers de la délégation environ. Car les restrictions vont crescendo, 30-40 % aujourd’hui et demain, un peu moins jeudi, seulement 90 personnes parmi les 22000 observateurs pour la plénière de vendredi.
Je rentre finalement à 15h en pleurant sur l’épaule d’un policier et en montrant la somme de papiers qui justifient de ma bonne foi.
Mission accomplie, je suis accueillie en héroïne par mes collègues à l’intérieur. Encore 40 minutes de queue pour un nouveau badge, puis 30 minutes d’attente dans une nouvelle file pour le retrait des badges de second niveau. Je suis opérationnelle pour travailler aux environs de 16h…
Le soir nous partons dans le quartier de Christiana à la Reclaim Power Party (voir post à venir aujourd’hui). Reclaim Power, c’est le nom de l’action organisée demain par les réseaux CJN et CJA. Le débat rassemble Naomi Klein, Michael Hardt, Tazio Müller (le principal animateur de CJA). L’objectif est clair : apaiser les esprits après la manifestation de samedi et les 700 arrestations, rappeler, à la veille de l’action, les valeurs communes de radicalité non-violente, la force du collectif et de sa détermination. Face à l’arbitraire policier, certains manifestants n’y croient plus et se préparent à l’affrontement. Le débat est presque tendu dans ses dernières minutes, mais Klein, Hardt et Muller parviennent à ramener la concorde.
Quand nous partons, un véhicule brule à l’extérieur de la yourte où se déroule la fête qui suit le débat. Quelques minutes plus tard la police, qui ne peut entrer dans Christiana, boucle le périmètre et gaze la zone. Des activistes sont arrêtés. Ils font la une des journaux danois ce matin.
La neige tombe maintenant sur les esprits échauffés. Les négociations piétinent.
[COP15] Mercredi 16 : action « Reclaim Power »
Nikolaz le mar, 15/12/2009
MARDI 15 DÉCEMBRE, 18H00
La police vient de faire une descente dans le quartier de Norrebro, sur le site de préparation des activités menées par le Bike Block qui planifiait ce mercredi des actions dans le cadre de la journée « Reclaim Power ». La nouvelle loi danoise permettant de réaliser des arrestations préventives semble marcher à merveille, en cette veille d’action… peut-être seront-elles/ils relachéEs demain midi, une fois l’action terminée…
Pas de quoi pour autant se désespérer !
La restriction du nombre d’accréditations plus s’approche le moment de l’arrivée des chefs d’Etat et de gouvernement et la finalisation possible d’un accord, ou du moins d’un agenda pour les mois à venir, peut contribuer au succès de l’action « Reclaim Power » : nombreuses seront les personnes qui devant Bella Center demanderont ce mercredi à être entendues en dehors du cadre fermé de la conférence des Nations unies !
A 8h00 ce mercredi, une manifestation partira de l’arrêt du RER situé avant celui du Bella Center pour rejoindre le lieu de conférence. Elle sera rejoint par de nombreux autres groupes qui auront pour objectif, non de bloquer ou d’empêcher la conférence de se tenir — comme c’est le cas lors des actions de blocage des réunions que nous jugeons illégitimes (G8, G20, etc.) —, mais d’inviter les différentes délégations présentes dans Bella Center à écouter les voix de celles et ceux qui sont « sans badge ». Il s’agit aussi de rendre visible et audible la parole de celles et ceux qui au sein du Bella Center sont confrontés à l’autisme des pays du Nord.
« 24 heures chrono » avec les activistes
Christophe Aguiton, militant d’ATTAC, actif dans la coalition Climate Justice Now !
Mardi 15 décembre, 15h05, Bella Center
Après une conférence de presse organisée par les coalitions CJN ! et CJA dans le centre de conférence pour appeler aux manifestations du lendemain, Tazio Muller, militant allemand du journal « Turbulence » est arrêté juste à sa sortie par trois policiers en civil, la police annonçant officieusement qu’il devrait être inculpé de « trouble à l’ordre public », peut-être parce qu’il a animé la veille un débat sur la désobéissance civile avec Naomi Klein et Mickael Hart à Christiania, l’ex -et toujours un peu- « commune libre » de Copenhague…
Mardi 18h, Klimaforum
La police arrête 20 militants français, des « désobéissants » qui faisaient un sit-in devant une conférence de businessmen avec une banderole (Climate is not your business).
Mardi 18h15, Klimaforum
Un coup de fil nous informe que la police fait un raid à la Candy Factory, une ancienne usine où les militants réparaient des vélos pour la manifestation du lendemain… Résultats : un militant et tous les vélos présents sont arrêtés !
Mardi 18h30, Klimaforum
Réunion extraordinaire du « board » de Klimaforum pour voir comment réagir face aux arrestations et interventions policières. Une réunion importante car la situation n’est pas facile entre les militants danois : CJA regroupe quasi exclusivement de très jeunes militants, actifs sur la scène alternative mais perçus souvent avec suspicion par les militants plus traditionnels du monde associatif. Finalement un accord est passé pour un communiqué de presse condamnant la lourde présence policière autour du Klimaforum.
Mardi 19h, Klimaforum
Réunion d’urgence à l’appel d’ATTAC Danemark et des Amis de la Terre suédois pour voir comment réagir face à la répression. Aucune décision n’est prise, mais les partis de gauche et les associations danois commencent à se dire qu’il n’est pas possible de laisser faire les choses sans réaction…
RTXRW9M_Comp RTXRWPM_Comp Mardi 19h, Klimaforum Plus de 400 militants au « briefing » quotidien de CJN !
20mn de débriefing sur les dernières nouvelles des négociations, la poursuite du blocage et les différentes « manœuvres » pour tenter de diviser les pays du sud.
20mn d’informations sur la répression, la présentation du communiqué de presse de CJN ! et le lancement d’un appel auprès de toutes les délégations nationales pour qu’elles le relaient ou en écrivent un spécifique pour leur propre presse.
30mn pour préparer les actions du 30, avec conseils légaux, numéros de téléphone d’avocats et surtout des rendez-vous donnés pour le lendemain pour les délégués accrédités, mais aussi pour ceux qui se voient refuser leur accréditation (les délégations voient leur nombre réduit de 80%) et qui protesteront devant l’entrée du Bella Center, et surtout pour la manifestation qui partira de la gare de Tarnby.
Mardi 20h 30, Klimaforum
Réunion technique rapide pour vérifier que tout ce que devait faire Tazio Muller (principal animateur de CJA) est pris en charge par d’autres militants. Échanges de numéros de téléphone pour la coordination des actions du lendemain.
Mardi 21h 30, restaurant
Diner avec les militants thaï, philippins et indiens, échanges d’impression et préparation pour le lendemain.
Mardi 23h
Juste avant de se coucher, coup de fil annonçant une descente de police dans les locaux où les représentants de « Via Campesina », la fédération internationale de paysans dont fait partie la Confédération Paysanne en France, tenaient une conférence. Ils étaient sortis quelques minutes auparavant…
Mercredi 7h 30, dans le train
Coup de fil annonçant l’exclusion de la conférence des 90 militants des Amis de la Terre.
Mercredi 8h, à la station de train Tarnby
Plusieurs centaines de jeunes militants se retrouvent joyeusement, malgré le froid, une samba venue de France réchauffe l’atmosphère. Les représentants de Via Campesina et Jubilee South, la coalition qui exige l’annulation de la dette des pays pauvres, prennent la tête de la marche qui compte bientôt de 5.000 à 10.000 manifestants.
Mercredi 8h45, Tarnby
Il est temps d’essayer d’entrer au Bella Center. Descente à la gare où un employé des chemins de fer explique aux passagers que le trafic des trains est arrêté par la police : des militants seraient sur les voies…
Seule solution, un jogging sous la neige pour arriver à temps au Bella Center… A mon âge et avec un badge de délégué, aucun problème pour y arriver. La police présente à tous les coins de rue me renseigne poliment sur le chemin à prendre.
Mercredi 9h30, Bella Center
Pas de problème –ouf– pour entrer.
Une vingtaine de militants indigènes indiens protestent devant l’entrée.
Après la sécurité, rencontre avec José Bové qui vient juste d’être interpellé, pour 10mn, par la sécurité de la conférence.
Mercredi 10h, Bella Center
Rencontre dans le grand hall avec les militants qui préparent l’action. La responsable presse de CJN ! est parveune à faire venir toute la presse américaine, ce qui n’est en général pas si simple. La presse française, allemande et italienne est là aussi. Série d’interviews pour expliquer pourquoi nous sommes là.
Pas pour réclamer la fin des négociations. Au contraire pour exiger un « bon accord », qui engage de façon contraignante les pays à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre en suivant au moins les recommandations du GIEC, qui reconnait la responsabilité historique des pays du Nord et qui dégage les fonds nécessaires à l’adaptation et à la conversion énergétique des pays pauvres.
Nous sommes là également pour protester contre les tentatives d’étouffer toutes voix dissidentes, par des arrestations massives ou des interdictions de participer à la conférence.
Mercredi 11h, Bella Center
L’action démarre, sous les cris « climate, justice ! » et les slogans. Plus de 200 représentants de mouvements et d’ONGs, rejoints par des représentants de la délégation bolivienne, parcourent le centre de conférence. Une cohue incroyable de journalistes et de caméras.
La sécurité des Nations unies est bon enfant, ravie de voir que l’on se dirige vers la sortie.
Mercredi 11h45, extérieur du Bella Center
La petite manifestation sort de la salle de conférence. Elle est rejointe par quelques dizaines de délégués non admis qui attendent dehors et marche vers le lieu où est arrivée la grande manifestation. Après de longues négociations, la police empêche toute jonction. Le groupe est arrêté sur un petit pont, la police matraque, mais sans arrestation. A l’inverse, de l’autre côté des palissades, des centaines de personnes sont en train de se faire arrêter.
Mercredi 12h 30 extérieur du Bella Center
Nous contournons les barrages policiers pour essayer de rejoindre le gros de la manifestation partie de Tarnby. Un dernier cordon nous en empêche. Tentative de rentrer au Bella Center, toutes les entrées sont interdites aux ONGs et bientôt à la presse, seuls ceux qui sont à l’intérieur peuvent y rester.
Mercredi 15h, centre-ville
Retour vers le Klimaforum. Coup de fil : le caucus des peuples indigènes qui devait avoir une réunion avec Evo Morales au Bella Center est interdit d’entrée…
Au Klimaforum09, sommet alternatif de Copenhague
Par Louis Villers | Reporter / LINTERVIEW.fr | 14/12/2009 | 15H50
(De Copenhague) En parallèle du COP15, le sommet des Nations unies sur le changement climatique, se déroule à Copenhague le Klimaforum09, « sommet des peuples » alternatif où l’on croise militants verts, hippies, activistes et experts du réchauffement climatique.
L’initiative émane de quatre jeunes habitants de la capitale danoise, qui ont réussi à fédérer une centaine d’ONG, dont Attac, les Amis de la Terre… qui avaient déjà fourni les rangs de la grande manifestation de samedi.
Les 10 000 personnes qui fréquentent ce lieu chaque jour sont invitées à signer un appel à un accord ambitieux de réduction de 40% des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2020 et de consacrer l’équivalent de 1,5% du PIB mondial à aider les pays les plus vulnérables à s’adapter aux changements climatiques.
Car pour ces militants, ce sont les pays développés qui sont coupables du blocage actuel des négociations officielles. Anaïde, l’une des organisatrices, résume la spécificité de ce contre-sommet. (Voir le diaporama sonore)
Cette déclaration finale intitulée « Changer le système, pas le climat » sera remise ce lundi aux représentants de la conférence officielle, située, elle, au Bella Center de Copenhague.
Venus du bout du monde ou du coin de la rue pour la même cause, ils apportent tous avec eux leur propre histoire. Nous en avons croisés qui ont fait le voyage depuis l’Australie à vélo, qui souhaitaient changer la constitution allemande, d’autres encore qui nous calculaient le CO2 en fonction de la taille des chaussures…
Ils sont marginaux ou experts, une chose est sûre, cette conférence alternative leur offre la possibilité de s’exprimer, de faire entendre leurs voix. (Voir le diaporama sonore)
Au Klimaforum09, on retrouve l’essentiel des débats officiels et des personnalités importantes. Pas de chefs d’Etat et leur armée de diplomates, mais des prix Nobel de la paix (pas Barack Obama certes, mais la Kenyane Wangari Maathai), Marina Silva, candidate verte à l’élection présidentielle brésilienne, des experts internationaux, ou même des politiques français, tel que notre José Bové national qui a répondu à nos questions. (Voir la vidéo, excusez le mauvais éclairage, il faisait nuit…)
Manifestant la journée, se retrouvant le soir au Klimaforum09, les « petites voix » tenteront de se faire entendre le plus possible des puissants de ce monde. En attendant, tous rangent leur sac de couchage dans les salles de conférence. Une longue nuit de « négociations » arrosées s’achève. Une autre manifestation aura bientôt lieu.
(Avec Alexis Sarini)
[COP15] Les manifestations et la police danoise
Nikolaz le lun, 14/12/2009
Le week-end des 12 & 13 décembre était le point fort du Contre-sommet, avec notamment la manifestation imposante du samedi. Dès le vendredi matin, les forces de l’ordre s’étaient déployées dans le centre ville. A 10h00 avait notamment lieu la première action organisée par Climate Justice Action – CJA (coalition d’obédience libertaire). Il n’est pas certain que cette première action ait été un succès ; mais elle ne semble pas non plus avoir donné lieu à une répression policière.
L’objectif était d’interrompre les activités des entreprises prenant part aux négociations de la Conférence de l’ONU et/ou sponsorisant l’espace « Hopenhagen » installé place de l’Hôtel de Ville pour promouvoir l’éco-blanchiment (greenwashing). On retrouve ici les multinationales locales comme Siemens, Carlsberg et d’autres comme McDonalds, SAP, CocaCola, etc.
Depuis le jeudi soir, les personnes ne cessaient d’arriver à Copenhague après quelques contrôles d’identité aux frontières (suspension des accords de Schengen). Les hébergements collectifs se remplissaient d’heure en heure. Un cortège important semblait pouvoir défiler le samedi dans les rues de Copenhague en direction de Bella Center.
La violence policière a réellement commencé ce samedi après-midi avec la ponction d’un tronçon de cortège (cf. cette page). Le sens de cette opération semble avoir été simple : permettre aux journalistes du monde entier de relayer dès le soir-même des infos sur les violences commises par des « éléments ultra-violents minoritaires ». Guère d’images de ces violences pourtant largement commentées ; nous ne disposons en fait que des images de l’arrestation massive de près de 1000 personnes, filmée par la police elle-même et diffusée en quasi-direct.
L’interdiction de la manifestation du dimanche midi en direction du port était un pas de plus dans la confiscation de la contestation (cf. cette page). La police se comportait comme bon lui semblait, ne respectait pas les autorisations de manifestation et usait largement de la nouvelle loi sur les « arrestations préventives » permettant de priver de liberté pendant 6 heures quiconque participe à une manifestation.
La semaine d’action semblait mal engagée, avec un comportement policier plutôt agressif cherchant à discréditer voire tout simplement priver de parole la mobilisation citoyenne.
La manifestation No Border de ce lundi midi, sous le mot d’ordre « Pas de frontières ! Pas de réfugiés climatiques », a toutefois montré un léger changement. L’encadrement policier était certes important (un cordon de policiers de chaque côté de la rue et de nombreux fourgons le long du parcours dans les rues adjacentes), mais 2000 personnes ont tout de même pu manifester dans les rues du centre-ville de Copenhague jusqu’au Parlement sans que le moindre heurt n’ait lieu.
La sphère symbolisant la Terre, d’un volume équivalent à une tonne de CO2, installée sur la place du Parlement à l’initiative du Ministère du Climat et de l’Energie, a eu droit à être libérée de ses amarres pour faire un tour du bâtiment traînée par une foule qui dansait au rythme de la sono du camion ou de la samba avec lesquels nous avions fait le parcours. Un esprit bon enfant régnait, que la police a su respecter, nous barrant les accès au centre-ville et nous amenant à quitter les lieux vers les faubourgs sans employer la force. (1)
Il ne s’agit pas ici de faire un éloge de la manière dont la police se porte garante des droits civiques, juste de rapporter à chaud quelques impressions concernant la manière dont se déroulent les manifestations du Contre-sommet. Cela peut aussi être une manière d’envisager comment pourrait se passer celle de ce mercredi 16 « Reclaim Power » visant à interpeller au plus près de Bella Center les différents négociateurs présents dans la conférence de l’ONU pour échanger avec eux sur les contenus concrets de ce que pourrait être la « justice climatique » dont un bon accord serait l’expression.
Nikolaz
(1) Selon les dernières nouvelles (ce lundi à 18h00), la post-manif’ en direction des faubourgs aurait été l’occasion de nouvelles interpellations.
MARDI 15 DÉCEMBRE, 18H00
La police vient de faire une descente dans le quartier de Norrebro, sur le site de préparation des activités menées par le Bike Block qui planifiait ce mercredi des actions dans le cadre de la journée « Reclaim Power ». La nouvelle loi danoise permettant de réaliser des arrestations préventives semble marcher à merveille, en cette veille d’action… peut-être seront-elles/ils relachéEs demain midi, une fois l’action terminée…
Pas de quoi pour autant se désespérer !
La restriction du nombre d’accréditations plus s’approche le moment de l’arrivée des chefs d’Etat et de gouvernement et la finalisation possible d’un accord, ou du moins d’un agenda pour les mois à venir, peut contribuer au succès de l’action « Reclaim Power » : nombreuses seront les personnes qui devant Bella Center demanderont ce mercredi à être entendues en dehors du cadre fermé de la conférence des Nations unies !
A 8h00, une manifestation partira de l’arrêt du RER situé avant celui du Bella Center pour rejoindre le lieu de conférence. Elle sera rejoint par de nombreux autres groupes qui auront pour objectif, non de bloquer ou d’empêcher la conférence de se tenir — comme c’est le cas lors des actions de blocage des réunions que nous jugeons illégitimes (G8, G20, etc.) —, mais d’inviter les différentes délégations présentes dans Bella Center à écouter les voix de celles et ceux qui n’ont pas de « badge ». Il s’agit ici de rendre visible et audible la parole de celles et ceux qui au sein du Bella Center sont confrontés à l’autisme des pays du Nord.