Jeudi 11 août 2016 à 13 h, à l’UQAM DS-2585
Debout, les damnés de la terre
Debout, les forçats de la faim
La raison tonne en son cratère.
C’est l’éruption de la faim.
Eugène Pottier, L’Internationale
La mondialisation de la production alimentaire déplace les enjeux et les défis à une échelle internationale. La dégradation de la biosphère et ses conséquences sur la disponibilité alimentaire, tout comme la spéculation effrénée qui l’accompagne, dévoilent de plus en plus ouvertement les aspects systémiques et inter-reliés des enjeux auxquels font face les mouvements populaires. Comment relier les mouvements écologistes et communautaires dans une démarche convergente vers une société écologiste dans des domaines comme l’alimentation ? Quelles sont les pratiques inspirantes dans le domaine ?
Les intervenants et l’intervenante
- Frédéric Paré (Regroupement des cuisines collectives du Québec)
- Amélie Daigle (Paroles d’excluEs, Québec)
- Rob Robinson (International Alliance of Inhabitants, É.-U.)
- Jean-Paul Faniel (Table de concertation sur la faim et le développement social, Québec)
Il y a des alternatives
Si les citoyens et les entreprises, qu’elles soient de l’économie sociale ou capitalistes, peuvent jouer un rôle dans l’avènement d’un système alimentaire plus juste et écologique, ils ne sont pas responsables pour autant de son avènement. Le droit à l’alimentation, au travail décent, à la santé ou celui à un environnement sain, sont des droits dont la réalisation repose sur la capacité régulatrice et la fonction même d’un État, garant du bien commun. Ce rôle régulateur de l’État que nous réclamons doit être mis en perspective par rapport aux autres approches plus ou moins interventionnistes en la matière (l’État producteur et distributeur style URSS, l’État subventionnaire, l’État incitateur et l’État laissant tout le contrôle au marché). Comme exemple d’un État régulateur, la Table sur la faim et le développement social du Montréal métropolitain propose l’élargissement de la gestion de l’offre à d’autres produits du panier alimentaire de base afin d’en stabiliser les prix et d’en permettre l’accessibilité à tous. Autre exemple d’un État régulateur est celui de la SAQ dans le Grand Nord où le contrôle de l’État sur la distribution d’un produit stabilise les prix sur tout le territoire. Tous s’entendent pour dire que l’agriculture biologique est meilleure pour la santé de la planète et celle des personnes. Après plus de 50 ans de pratique au Québec et une reconnaissance claire du public, elle n’occupe toujours pas plus que quelques points de pourcentage sur l’ensemble des ventes alimentaires au Québec. Il en va de même pour le transport en commun. Bien qu’il progresse, y accéder devient de moins en moins accessible. Ces deux solutions (alimentation bio et transport en commun) n’ont pas encore fait l’objet de véritable choix collectif. Et qu’en est-il de la sécurité alimentaire, prise en charge par des organismes communautaires et le don alimentaire ? Quel sérieux accorde-t-on au droit à l’alimentation, chez nous ? Et si les dépenses gouvernementales nous le disaient…
Frédérick Paré
Changer le système
Les forces contradictoires du système capitaliste dans un contexte où tous les secteurs d’activité visent à maximiser leurs profits, produisent une agriculture où nombreux sont ceux qui ont faim, bien que la nourriture soit abondante. D’autre part, il y a peu de véritable recyclage des matières organiques, ce qui augmente la dépendance aux engrais de synthèse alors que des quantités excessives de substances nutritives s’accumulent dans des fermes d’élevage industriel et dans les villes. Notons enfin que le travail dans les fermes ou dans les abattoirs est souvent marqué par l’abus, voire la cruauté, et que la pollution due aux pesticides et aux engrais est endémique. Les décisions et les pratiques courantes des agriculteurs conventionnels et d’autres intervenants du système agricole ne paraissent sensées, rationnelles, que si elles sont vues dans la perspective du profit maximum inhérent au système capitaliste. On doit donc conclure que la manière dont fonctionne le système agricole capitaliste dans le monde réel est irrationnelle d’un point de vue environnemental et social. À quoi pourrait ressembler une agriculture rationnelle ? Une agriculture rationnelle serait pratiquée par des agriculteurs individuels ou des associations (coopératives) d’agriculteurs et aurait comme objectif de fournir à la population entière, en quantité suffisante, de la nourriture de bonne qualité et variée tout en veillant à ce que les fermes et les champs soient exploités selon des méthodes humaines pour les animaux et en harmonie avec l’écosystème.
Fred Magdoff