16 octobre 2007
http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article7850
Rénover, refonder à la gauche du PS, c’est une idée en gestation depuis plus de vingt ans. Elle a accompagné les crises identitaires du Parti communiste dans les années 1980 et elle a mûri au gré de ses soubresauts. De textes à foison, en appels à répétition, de forums en réunions, rien n’a émergé de façon pérenne. Seuls des espoirs temporaires, mais finalement sans lendemain comme la victoire du non au référendum sur la Constitution européenne, ont constitué des éclaircies dans ce ciel bouché. Des milliers de citoyens observent avec perplexité ces balbutiements de l’offre politique de la gauche radicale émiettée. Des militants du PC, des Verts, de la LCR, du PS, du MRC, du PRG… se demandent comment sortir du labyrinthe. L’impatience est palpable. Le découragement aussi.
La droite a gagné les dernières élections parce qu’elle avait un projet, séquencé dans un programme. La gauche a perdu parce qu’elle était dépourvue d’une visée claire et audible, mais aussi parce que sa division, dans sa frange réformiste et plus encore dans sa partie radicale, était au moins aussi tangible que ses lacunes de contenu.
Sarkozy est désormais aux manettes. Il agit en homme orchestre, prince et factotum à la fois. Il secoue le shaker des réformes libérales, il flatte les adeptes du tout-sécuritaire en accommodant à la sauce moderne, comme pour les tests ADN sur les immigrés, des pratiques qui rappellent des heures sombres de l’Histoire. Il fait plaisir au Medef et aux catégories les plus aisées de la population, il désigne des boucs émissaires et s’attaque à des acquis sociaux de plus de cinquante ans…
Mais pour le reste ? Quid des attentes de l’électorat, notamment populaire, qui l’a porté au pouvoir ? Pouvoir d’achat, emploi, croissance, logement… Les résultats annoncés avec force roulements de tambour ne sont pas au rendez-vous, pire vont se retourner contre le peuple. De ce point de vue, le président dégage, en creux, des perspectives pour une alternative politique. C’est au contour et au contenu de celle-ci qu’il est urgent de travailler. Depuis cet été, des textes circulent, des appels fleurissent. Chacun y va de sa petite musique, dans son coin.
Et les partis politiques de la gauche historique programment leur nécessaire rénovation à l’aune de l’échéance de leurs calendriers. Il faut attendre, toujours attendre que les congrès se tiennent… fin 2008 ! D’ici là, d’autres textes paraîtront, d’autres voix s’élèveront pour déplorer que les organisations campent sur leurs grands soirs partisans.
LA CHARRUE AVANT LES BOEUFS
Alors, que faire ? Attendre ces grandes messes ? S’échiner chacun dans son coin ou se bouger ensemble ? Et si, pour une fois, nous choisissions la deuxième solution ? Et si nous mettions de côté les problématiques de chapelle, et que nous travaillions à l’unité des petits conglomérats qui prônent la transformation sociale ? Et si la somme des micro-planètes de la galaxie gauche de gauche s’évertuait à la mise en commun, non pas pour collationner un catalogue, mais pour valider des contenus sur les enjeux sociaux, économiques, écologiques et sociétaux ?
Et si, cette fois, pour parvenir à cette mise en commun des contenus nous mettions la charrue avant les boeufs en menant ce travail à partir d’une organisation structurée et revendiquée comme telle, ce que, pour des raisons diverses, nous avons toujours refusé de faire ? Et si nous osions, enfin, créer une coordination, un réseau ayant pignon sur rue, statuts et porte- parole, qui permettrait aux citoyens sans carte comme aux militants encartés mais désireux de réfléchir pour agir, de pouvoir le faire au grand jour ?
Et si, cette fois, nous ouvrions en grand les portes et les fenêtres pour donner de l’air à celles et ceux qui ne désespèrent pas de donner du muscle au courant de la gauche de transformation sociale ? C’est le sens de cette sollicitation publique qui a pour vocation à devenir la propriété commune de tous ceux qui ne se satisfont pas de l’éclatement du courant de pensée qui prône l’alternative plutôt que l’alternance.
* Article paru dans le Monde, édition du 16.10.07. LE MONDE | 15.10.07 | 15h07.
* Patrick Braouezec est député de Seine-Saint-Denis.