Comme plusieurs l’ont déjà souligné sur différentes tribunes, Lorraine Guay, décédée le 17 juin dernier a accompli des tâches immenses dans les différents milieux militants et professionnels dans lesquels elle a été impliquée : Jeunesse étudiante catholique (JEC), Clinique communautaire de Pointe-Saint-Charles, Regroupement des ressources alternatives en santé mentale, Marche Du Pain et des Roses, Marche mondiale des femmes, Réseau de Vigilance, D’abord solidaires, OUI Québec, implication en solidarité internationale en Amérique latine et jusqu’à tout récemment au sein de Palestiniens et Juifs unis (PAJU)[1]. Au-delà de ce qu’elle a réalisé, dont nous sommes tous et toutes les bénéficiaires au Québec, j’aimerais rendre hommage à ce qu’elle nous laisse, comme personne, comme femme, comme militante. Cet héritage est précieux et mérite d’être partagé afin « qu’une certaine manière d’être au monde », comme elle le dirait, se poursuive et se transmette.
Lors d’une intervention publique à propos du livre Qui sommes-nous pour être découragées ?[2], Lorraine précise que si la militante traverse des moments de découragement, parce que les actions posées ne semblent pas avoir des effets suffisants et qu’on peut avoir le sentiment de devoir toujours recommencer, c’est la « posture » militante qui nous permet de remettre sans relâche l’ouvrage sur le métier, de percevoir que les luttes ne sont pas individuelles mais collectives, et donc plus grandes que nous. Les luttes ne nous appartiennent pas, nous avons le devoir de les faire vivre lors de notre passage sur terre, tout en sachant que ce sont les générations suivantes et à venir qui les poursuivront.
C’est également cette posture qui vient avec des qualités dont Lorraine débordait : la générosité, le soin aux autres, l’amour de la vie, mais aussi la capacité de douter, de se mettre en déséquilibre pour comprendre et apprendre, tout en gardant toujours la ligne rouge de la lutte pour la justice sociale comme horizon de court et de long terme. Elle savait être tenace dans sa quête. Lorraine était une femme fascinante. Je souhaite sincèrement que son parcours, ses écrits, ses actions nous inspirent pour l’éternité.
Pascale Dufour
Professeure au département de science politique de l’Université de Montréal.
- On trouvera une grande entrevue avec Lorraine Guay sur son parcours militant dans le n° 14 des Nouveaux Cahiers du socialisme, 2015. ↑
- Pascale Dufour, Lorraine Guay, Qui sommes-nous pour être découragées ? Conversation militante avec Lorraine Guay, Montréal, Écosociété, 2019. ↑