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Trump à la Maison blanche : La droite dure contre l’establishment ?

La victoire du républicain Donald Trump amène au pouvoir le président le plus réactionnaire de l’histoire contemporaine des États-Unis. Elle ouvre aussi sur un futur incertain, ne serait-ce que parce que cet homme est un total outsider politique. Il est cependant sûr que sa victoire va conduire à des attaques contre le monde du travail, les femmes, les latinos, les afro-américains et les personnes LGBT.

Le triomphe de Trump est une défaite cuisante pour le Parti démocrate. Il marginalise le petit Parti Vert (1%), tandis que le Parti libertarien de Gary Johnson fait trois fois mieux.

Trump n’a pas seulement gagné la présidentielle. Le Parti républicain a aussi gardé le contrôle du Sénat et étendu sa domination sur la Chambre. Le président va désormais être en position de désigner ses hommes aux postes vacants, notamment à la Cour Suprême. De plus, les gouverneurs républicains sont aujourd’hui à la tête de 31 États, alors que dans 27 autres, ils contrôlent les parlements.

En réalité, la candidature de Trump a profondément divisé le Parti républicain, si bien que les Démocrates disposent toujours d’une capacité d’obstruction au Sénat. Gouverner ne va donc pas être simple. Comment le nouveau président va-t-il satisfaire sa base ouvrière en défendant un agenda politique conservateur et pro-business ? Comment son gouvernement va-t-il gérer l’Obamacare, l’assurance maladie dont dépendent tant de personnes.

Donald Trump va sans doute devoir faire face à une récession économique et à des situations de crise à l’étranger – Irak, Syrie, Russie, Chine –, qui vont constituer autant de défis. Nous allons traverser des eaux glaciales encore inconnues, voire une mer démontée.

Trump a mené une campagne fondée sur une plateforme économique nationaliste, usant d’une rhétorique raciste, anti-migrants et misogyne. Il a remporté l’élection de ce 8 novembre en mobilisant des dizaines de millions d’électeurs·trices blancs, issus des classes moyenne et ouvrière dégoûtés, et en colère contre Washington et l’establishment new-yorkais.

Ironie pour la gauche : ce sont les travailleurs·euses qui ont assuré la victoire de Trump. Les électeurs·trices blancs vivant dans des banlieues aisées ont toujours formé la base du Tea Party et de Trump ; mais le facteur clé de sa victoire, c’est la conquête des ouvrier·e·s blancs du « Rust Belt » – Pennsylvanie, Virginie Occidentale, Ohio, Indiana et Michigan. Il a aussi obtenu le soutien d’électeurs·trices des petites villes et des zones rurales du pays.

Les travailleurs·euses blancs, trompés par le Parti démocrate depuis 40 ans, ont graduellement rejoint le camp républicain. Et cette année, ils l’ont fait en masse. Trump a gagné ces couches sociales en leur parlant de réindustrialiser le pays, de créer des emplois, de défendre leur job contre les sans papiers, et de protéger les États-Unis de la concurrence étrangère. Tout en promettant de défendre le territoire national contre le terrorisme, il s’est également prononcé contre l’engagement des USA dans des guerres à l’étranger pour renverser des régimes en place.

À la surprise générale, il a aussi gagné nombre de voix parmi les minorités de couleur, recevant 29% du vote hispanique et 29% du vote asiatique. Clinton n’a pas réussi à mobiliser la communauté afro-américaine comme Obama l’avait fait en 2012 en gagnant 93% du vote noir. Cette année, elle a recueilli 88% de ces voix, tandis que Trump en obtenait 8%, et le candidat libertarien 2%.

En dépit des sondages qui prédisaient que Bernie Sanders ferait mieux que Clinton contre Trump, les Démocrates ont choisi la candidate de l’establishment au lieu de leur propre candidat populaire, un « démocrate socialiste », avocat d’un nouveau New Deal. Le choix de Hillary Clinton plutôt que de Bernie Sanders semble avoir pavé la victoire de Trump.

Certains travailleurs·euses, d’abord attirés par le message de Sanders, se sont tournés vers Trump. Tandis que de nombreux jeunes électeurs·trices votaient pour Clinton, une partie des adeptes de Sanders n’ont pas pu se résoudre à voter Hillary. Quelques-un·e·s de ses partisans ont pu voter Trump, d’autres Johnson ou Stein, mais la plupart n’ont sans doute pas pris part à l’élection, furieux du rejet de leur candidat, et déprimés par l’alternative qui leur était présentée.

La victoire de Trump, qui appelle à l’interdiction de l’immigration musulmane, et demande la construction d’un mur pour stopper les migrant·e·s mexicains, a semé la crainte dans les cœurs, non seulement des Latino-américain·e·s et des musulman·e·s, mais elle a aussi effrayé les Afro-américain·e·s qui connaissent bien sa trajectoire raciste.

Au travers des États-Unis, il y a eu des manifestations anti-Trump, portées surtout par des jeunes qui chantaient : « Not My President ! ». Il est certain que ce mouvement va continuer et s’amplifier, et qu’il va entraîner aussi un nombre croissant d’électeurs·trices de Trump qui vont se trouver amèrement déçus. L’issue des confrontations à venir dépendra cependant de la capacité des anticapitalistes et des millions de personnes qui ont plébiscité Sanders de donner des perspectives solidaires à ces larges couches populaires.

 

 

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